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vendredi 19 février 2016

Marie-Antoinette

Zweig est décidément très bon en biographies. J'ai un souvenir émerveillé de Fouché et cette Marie-Antoinette risque de s'imposer dans mon panthéon personnel. Réellement, c'était à la fois sensible et prenant, documenté et imaginé, porté par la plume magnifique de notre petit chouchou de Zweig. 

Cupidon Cognacq Jay

S'il s'attarde assez peu sur l'enfance de la souveraine et sur les négociations de Marie-Thérèse, c'est pour mieux nous parler de la jeune fille qui arrive à Versailles après bien des bricoles protocolaires. Elle est jeune, charmante et frivole : tout pour enchanter Versailles. Le seul souci, sur lequel Zweig insiste énormément, c'est l'impuissance du petit Louis. Et de cette histoire va naitre toute une analyse psychologique de la souveraine, excitée mais jamais rassasiée... Et cette faim, ce désir, cette excitation des nerfs, elle se retrouve dans les dépenses et les fêtes continuelles de Marie-Antoinette. Sa maman a beau la sermonner, elle n'en fait qu'à sa tête. Bon, la maternité la calme un peu. Mais c'est avec la Révolution qu'elle va vraiment s'assagir et montrer une facette plus héroïque de sa personnalité et prendre plus de consistance alors que Louis XVI reste petit bourgeois. 

Il est aussi intéressant de lire le travail d'historien de Zweig, s'appuyant sur des archives pour camper sa biographie, et usant tous les ressorts de la psychologie pour faire ressortir les traits de ses personnages. Certains événements tiennent presque de la farce : l'affaire du collier ou la fuite à Varennes par exemple. Bref, on ne sait plus si l'on est dans un essai ou un roman. 

Autre point passionnant à mes yeux, la Révolution. Cette période de l'histoire qui ne m'avait jamais attirée prend des dimensions superbes sous la plume de Zweig ou de Dickens. J'ai aimé voir comment notre autrichien préféré faisait monter la tension, montrait cette machine s'emballant, incapable de s'arrêter. De quoi me donner envie de replonger dans La Révolution de F. Furet !

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jeudi 11 février 2016

Las ciudades perdidas del Paraguay

Cet ouvrage de Mac Naspy et Blanch nous permet de parcourir les 30 pueblos des anciennes réductions jésuites du Paraguay, d'Argentine et du Brésil. C'est un livre illustré de photos en noir et blanc, qui hésite entre propos historiques, artistiques, anthropologiques et personnels. Malgré ce mélange, l'ouvrage est une belle introduction à l'histoire des missions. Allez, on part en voyage ! 
 
Tout commence en 1607 avec la fondation d'une nouvelle province de l'ordre jésuite, la province du Paraguay. Débutent alors les missions d'évangélisation envers tribus nomades guaranies. Contrairement aux colons, qui prennent indiens comme esclaves ou serviteurs, les jésuites créent et gèrent des réductions qui fonctionnent en autonomie,  à l'écart des colons. 30 cités forment ce que l'on nomme ensuite la république guaranie avec 2000 à 4000 indiens par cité et 2 ou 3 jésuites. Le modèle des réductions est assez intéressant car il est parfois vu comme un prélude et un modèle pour le communisme. Que trouve-t-on dans ces réductions ? Des écoles pour les indiens, des enseignements en art avec pour but unique l’évangélisation. La première presse à imprimer des guaranis est mise en route en 1705... Voilà qui va accélérer la diffusion des catéchismes ! En 1767, l'aventure se termine avec l'expulsion des jésuites d'Espagne et des provinces de la couronne. Plus de 80 000 indiens habitaient alors les réductions qui sont attaquées par les militaires.
Entrons maintenant un peu plus dans le vif du sujet.

I. Las misiones en Paraguay, algunos lugares y pueblos

La présence des jésuites en Amérique du Sud remonte au 16e siècle avec la fondation du collège San Pablo au Pérou, à Lima (1568), la première école jésuite du continent.
Mais c'est au 17e siècle que se développent les missions, réparties entre le Paraguay, le Brésil et l'Argentine. Les héros des premières réductions se nomment Roque Gonzalez qui a fondé plusieurs réductions avant d'être assassiné par un cacique ou Ruiz de Montoya qui écrit les premiers dictionnaires et grammaires en guarani. Beaucoup de jésuites sont envoyés au Paraguay. Avant partir, ils devaient apprendre le guarani. Sur place, ils se retrouvaient confrontés à des souffrances physiques et morales (chaleur, bestioles, etc.) ainsi qu'à l'éloignement entre les différentes réductions.

2. Las reducciones en Paraguay

1609, nuit de Noël ou 29 décembre, les jésuites célèbrent la première messe à San Ignacio. La fondation officielle se fait en 1610. La légende dit que c'est fondé par San Roque, saint patron de la ville de San Ignacio, mais il n'arrive dans le coin qu'en 1611. La première réduction a certainement été fondée vers Santa Rita plus que dans le centre actuel qui remonte à 1667.
Les églises de San Ignacio sont construites en 1694 (destruction en 1911) puis en 1921 avec un intérieur en bois. On peut regretter la disparition de plus de 600 peintures à l'intérieur.
Autre réduction, Santa Maria de Fe, fondée en 1647 par Emmanuel Berthod, un français qui avait une grande dévotion à Notre-Dame de Foy. Son église est détruite en 1889 par un incendie mais l'on peut encore voire autour de la place centrale des maisons d'indiens, toujours habitées et un peu restaurées.
A côté, Santa Rosa dont l'église a aussi été détruite par un incendie (1883). Elle conserve un autel secondaire et une grande tour. On peut aussi y voir une belle chapelle avec des peintures et sculptures de Notre-Dame de Lorete et des maisons d'indiens.
Un peu plus loin, Santiago. Le saint, identifié en Espagne comme le vainqueur des maures, l'est ici contre les paulistes. On peut y découvrir de belles statues avec des influences flamandes !
De Trinidad, on retiendra l’église fondée en 1706, faite par Juan Bautista Primoli. Elle est considérée comme la plus belle des réductions avec ses frises d'anges musiciens et ses portes de style churrigueresque. On notera aussi l'originalité des maisons des indiens qui ont des voutes d’arête à la place des piliers traditionnels sur les galeries. Il subsiste aussi une tour qui pouvait être un campanile ou une horloge.
On termine avec San Cosme et Jesus. Cette dernière, jamais terminée, est étonnante avec ses portes surplombées par des arcs trilobes.

3. Misiones en Argentina

On déplore ici des réductions disparues complétement : Corpus Christi, Santos Martires, San José, Santo Tomé, San Javier, Encarnacion, Posadas, Concepcion, Apostoles, Santa Maria la Mayor, Santa Cruz, San Carlos, NUestra Señora de los Reyes Magos, Loreto. Et l'on passe par les ruines de Candelaria où vivait le supérieur des 30 pueblos. On s'arrête aussi à San Ignacio Mini, fondée en 1610, puis déplacée en raison des paulistes. L'église quant à elle (1690) serait de Brasanelli et Petragrassa. Elle est reconnue pour la richesse de sa sculpture, ainsi que celle du collège de la mission, qui emprunte au baroque européen. 

4. Las siete ciudades al otro lado del Uruguay

Au Brésil, on croise aussi des réductions. Là, il s'agit plutôt d'estancias avec de grandes cultures et des patures en plus du champ dévolu à chaque indien. Cela permettait l'autosuffisance de la réduction et la vente du surplus pour payer l'impot à la couronne. Parmi les jolies choses, on peut parler de l’église Santa Ana faite par Brasanelli, de la réduction  San Miguel, fondé en 1632 par Cristobal de Mendoza et Pablo Benavides, puis déplacée en 1687, qui conserve une église de style baroque romain, attribuée à Ribera ou à Primoli qui possédait deux tours dont l'une a été reconstruite.
Nos auteurs font aussi un petit excursus sur Antonio Sepp, musicien des missions, qui introduit des instruments de musique, de la harpe à l'orgue.

5. El barroco guarani

Bien sûr, il est difficile de parler d'un art baroque hispanico-guarani car de nombreux artistes des réductions sont italiens (Primoli, Brasanelli, Zipoli), français (Berger), autrichien (Sepp)... Et en termes de baroque, on dépasse largement la durée du courant connu en Europe puisqu'on parle d'un art qui a duré de 1580 à 1780. Par contre, on peut garder l'idée de baroque comme un courant qui assimile toutes influences. Quant à un art guarani, nos auteurs émettent quelques doutes. Selon eux, il n'y avait pas d'art guarani à l'exception de quelques poteries. Ceux-ci se révèlent excellent copistes mais n'ont jamais exprimé aucune originalité. Enfin, les sources et ruines leur paraissent trop peu pour parler véritablement d'un style.
L'architecture des missions suit un plan unique, composé d'une place avec une église à une extrémité encadrée par le cimetière et le collège. Autour de la place, les maisons des indiens, toutes sur un même modèle.

Epilogo

Enfin, on conclut sur la dispersion des guaranis ne sachant pas gouverner par eux-mêmes la cité après l'expulsion des jésuites et la destruction des réductions.

lundi 8 février 2016

La boule de neige

Bon, je crois que c'est le plus mauvais Dumas que je connaisse. Autant au niveau de l'intrigue que de l'écriture... Vous voulez tout de même que je vous raconte ?

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On est à Derbend, sur les bords de la mer Caspienne, et il fait chaud. Les tatars et les russes cuisent derrière leurs fortifications. Il y a bien une légende qui raconte qu'un jeune homme pur peut faire pleuvoir s'il verse de la neige dans la mer... Mais bon, on n'y croit moyen. 
En désespoir de cause, on envoie Iskander-Beg, un jeune garçon pur et fier. Mais pauvre. Accompagné de Ioussouf, un homme au nez si imposant qu'il mérite tout un chapitre sur les beautés du nez et ses usages (complétement délirant le truc). Bien sûr, les deux compères rencontrent un brigand célèbre, Moullah-Nour, sinon ce serait trop facile.
En plus de l'histoire de la sécheresse, une histoire d'amour se développe. Iskander est en effet amoureux de la belle Kassime, aparentée à son pire ennemi.

Alors, qu'est-ce qui pèche dans ce roman ? D'abord, l'exagération du contexte. On est dans un univers oriental et les "Par Allah" et les phrases longues et métaphoriques rendent le style imbuvable. C'est too much ! Ensuite, le scénario est sans surprise et sans intérêt. Les personnages ? A peine esquissés. Bref, ça fait roman bâclé. C'est toi Dumas ? Ou se sont tes nègres ?


vendredi 5 février 2016

L'homme à l'oreille cassée

Le jeune Léon revient de trois ans en Russie et se prépare à retrouver et à épouser sa jolie Capucine. Hélas, lors de sa soirée de retour, il dévoile tous les trésors qu'il rapporte de voyage... dont une momie du général Fougas, soldat de Napoléon, qui trouble beaucoup Capucine. Celle-ci s'émeut pour ce jeune homme, desséché par un savant allemand un peu fou, et désire le ressusciter. Après tout, le docteur Meiser n'a-t-il pas ôté l'eau du soldat pour le dérober à la mort et le faire revivre en un temps plus propice ? 40 ans plus tard, il est temps de tenter l'expérience. On va donc rendre à notre momie son eau... jusqu'à le ramener à la vie. Et là, drame, Fougas veut épouser Capucine, guerroyer contre les anglais et retrouver son fils. On le suit dans toutes ses quêtes et l'on s'amuse des anachronismes du jeune ressuscité !


Voilà des plombes que j'avais ce titre d'Edmond About sur ma LAL, à tel point que je ne me souviens plus qui me l'a conseillé. Divertissant et léger, il se lit vite et risque de ne pas me marquer longuement. Je retiendrai peut-être l'idée du dessèchement par les scientifiques et de la résurrection de notre héros qui entre dans la tradition de la recherche d'immortalité. Ce n'est pas sans nous rappeler les tentatives de cryogénisation ou tout autre tentative de vivre au-delà de son heure... Novateur en ce sens qu'il propose une approche presque scientifique de l'immortalité, il se perd malheureusement rapidement dans l'anecdotique. Et il fait très daté, très XIXe.

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