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jeudi 30 décembre 2021

Dickinson, poèmes choisis

511

If you were coming in the Fall,

I'd brush the Summer by

With half a smile, and half a spurn,

As Housewives do,  a Fly.

 

If I could see you in a year,

I'd wind the months in balls -

And put them each in separate Drawers,

For fear the numbers fuse -

 

If only Centuries, delayed,

I'd count them on my Hand,

Subtracting, till my fingers dropped

Into Van Dieman's Land.

 

If certain, when this life was out -

That yours and mine, should be -

I'd toss it yonder, like a Rind,

And take Eternity -

 

But, now, uncertain of the length

Of this, that is between,

It goads me, like the Goblin Bee -

That will not state - its sting.

 

561

I measure every Grief I meet

With narrow, probing, Eyes -

I wonder if It weighs like Mine -

Or has an Easier size.

 

I wonder if They bore it long -

Or did it just begin -

I could not tell the Date of Mine -

It feels so old a pain -

 

I wonder if it hurts to live -

And if They have to try -

And whether - could They choose between -

It would not be - to die -

 

I note that Some - gone patient long -

At length, renew their smile -

An imitation of a Light

That has so little Oil -

 

I wonder if when Years have piled -

Some Thousands - on the Harm -

That hurt them early - such a lapse

Could give them any Balm -

 

Or would they go on aching still

Through Centuries of Nerve -

Enlightened to a larger Pain -

In Contrast with the Love -

 

The Grieved - are many - I am told -

There is the various Cause -

Death - is but one - and comes but once -

And only nails the eyes -

 

There's Grief of Want - and Grief of Cold -

A sort they call "Despair" -

There's Banishment from native Eyes -

In sight of Native Air -

 

And though I may not guess the kind -

Correctly - yet to me

A piercing Comfort it affords

In passing Calvary -

 

To note the fashions - of the Cross -

And how they're mostly worn -

Still fascinated to presume

That Some - are like My Own -

 

579

I had been hungry, all the Years -

My Noon had Come - to dine -

I trembling drew the Table near -

And touched the Curious Wine -

 

'Twas this on Tables I had seen -

When turning, hungry, Home

I looked in Windows, for the Wealth

I could not hope - for Mine -

 

I did not know the ample Bread -

'Twas so unlike the Crumb

The Birds and I, had often shared

In Nature's - Dining Room -

 

The Plenty hurt me - 'twas so new -

Myself felt ill - and odd -

As Berry - of a Mountain Bush -

Transplanted - to a Road -

 

Nor was I hungry - so I found

That Hunger - was a way

Of Persons outside Windows -

The Entering - takes away -

 

580

I gave myself to Him -

And took Himself, for Pay,

The solemn contract of a Life

Was ratified, this way -

 

The Wealth might disappoint -

Myself a poorer prove

Than this great Purchaser suspect,

The Daily Own - of Love

 

Depreciate the Vision -

But till the Merchant buy -

Still Fable - in the Isles of Spice -

The subtle Cargoes - lie -

 

At least - 'tis Mutual - Risk -

Some - found it - Mutual Gain -

Sweet Debt of Life - Each Night to owe -

Insolvent - every Noon –

 

609

I - Years had been - from Home -

And now - before the Door -

I dared not enter - lest a face

I never saw before

 

Stare vacant into mine -

And ask my Business there -

My Business - just a Life I left -

Was such – still dwelling  there?

 

I fumbled at my nerve –

I scanned the Windows o’er -

The Silence - like an Ocean rolled -

And broke against my Ear -

 

I laughed a Wooden Laugh

That I - could fear a Door -

Who Danger – and the Dead – had faced -

And never shook - before.

 

I fitted to the Latch - my Hand

With trembling care -

Lest back the Awful Door should spring -

And leave me - in the Floor --

 

Then moved my fingers off, as cautiously as Glass -

And held my Ears - and like a Thief

Stole - gasping - from the House.

 

610

You'll find - it when you try to die -

The Easier to let go -

For recollecting such as went -

You could not spare - you know.

 

And though their places somewhat filled -

As did their Marble names

With Moss - they never grew so full -

You chose the newer names -

 

And when this World - sets further back -

As Dying - say it does -

The former love - distincter grows -

And supersedes the fresh -

 

And Thought of them - so fair invites -

It looks too tawdry Grace

To stay behind - with just the Toys

We bought - to ease their place -

 

613

They shut me up in Prose -

As when a little Girl

They put me in the Closet -

Because they liked me "still" -

 

Still! Could themself have peeped -

And seen my Brain - go round -

They might as wise have lodged a Bird

For Treason - in the Pound –

 

Himself has but to will

And easy as a Star

Abolish his Captivity -

And laugh - No more have I -

 


669

No Romance sold unto

Could so enthrall a Man -

As the perusal of

His Individual One -

'Tis Fiction's – to dilute plausibility

Our – Novel - When 'tis small eno’

To Credit - 'Tisn’t true -


lundi 27 décembre 2021

Les contes de l'Alhambra

J'ai noté ce titre de Washington Irving lorsque j'ai visité ce magnifique monument de Grenade. Croisé au hasard d'une boite à livre (eh oui, parfois il y a des petits trésors là-dedans), je l'ai finalement lu récemment. Notre auteur, américain, se met en scène lors d'un voyage en Espagne. Il vantera fortement le caractère des espagnols, fiers, honnêtes, un peu rustres, et de la terre qui les porte. A mesure de son récit de voyage et de son installation dans l'Alhambra - on peut faire ça au XIXe, c'est dingue, non ?-, il collecte des contes. Ceux-ci se passent souvent à l'époque médiévale, sous le règne des Maures ou à la Reconquista. Il est question de trésor, de fantômes, de femmes... C'est charmant !



mercredi 22 décembre 2021

La ballade du calame

Jolie découverte que cette œuvre d’Atiq Rahimi que je lis pour la première fois. J’ai un magnifique souvenir de Syngue Sabour, le film qui a été tiré de son livre. Encore une histoire d’exil, avec un afghan, c’est un peu monomaniaque ce blog ! Eh bien, pas vraiment. Car l’exil, même s’il en est question, n’est pas au centre de l’ouvrage. Ce sont plutôt des digressions poétiques sur l’écriture, la callimorphie (un art de l’encre, des lettres et des formes féminines – mais pas que), l’enfance, la spiritualité, l’exil enfin.

Ne cherchez pas un témoignage dans ce livre, vous aurez plutôt des morceaux de vie et beaucoup de pensées.

« Mon pays a sombré dans la terreur de la guerre, dans l'obscurantisme, et, là-bas j'ai perdu les clefs de mes songes, de ma liberté, de mon identité… Aussi l'ai-je quitté en espérant retrouver mes clefs là où il y a de la lumière, de la liberté, de la dignité… tout en sachant que je ne les retrouverai jamais. Toute création en exil est la recherche permanente de ces clefs perdues »
« On me demande souvent si je me sens plutôt afghan ou français.

- Afghan quand je suis en France, français quand je suis en Afghanistan.

Je suis donc toujours ailleurs.

Ailleurs, c'est l'espace de mon errance.

Là où se perd mon corps : Je suis là où je ne suis pas.

Là où s'évadent mes souvenirs, mes rêves, mon désir…

[…]

« Ailleurs je n'arrive pas à le définir.

Il est indéfinissable.

Il n'est ni là où je suis,

ni là d’où je viens,

ni là où je vais.

Cet endroit refuse d'être désigné, nommé.

Ailleurs est le vrai sens de l'exil »

lundi 20 décembre 2021

Extérieur monde

Je ne sais pas trop quoi vous dire de ce roman d'Olivier Rolin, offert par une collègue. Si j'ai apprécié quelques passages, je me suis globalement ennuyée. L'écriture est souvent belle, c'est elle qui m'a permis d'arriver au bout de la lecture.

Il ne s'agit pas de mémoires et pourtant ça y ressemble furieusement. L'auteur reprend ses carnets de notes, se souvient de voyages, de femmes, d'aventures dans divers pays du monde. Il parle aussi d'artistes, de littérature, de ses propres livres. Pas de pitch à vous livrer, ça part dans tous les sens, à l'image de cette citation :

"(puisque nous en étions là avant ces digressions qui seront je le pressens la matière même du livre, comme la liberté anarchique, rayonnante des branches, des rameaux, des feuilles, est l'être des arbres, et j'aime concevoir un livre comme un arbre, cette comparaison venant peut-être de Flaubert qui voulait "que les phrases s'agitent dans un livre comme les feuilles dans une forêt, toutes dissemblables en leur ressemblance")


vendredi 17 décembre 2021

Profanes

Voilà un très joli roman de Jeanne Benameur ! Je crois que c'est celui que j'ai préféré jusqu'à présent. 

Octave Lassalle rassemble quatre personnes autour de lui, quatre personnes pour l'accompagner dans chaque journée. Il a 90 ans, il est retraité de son métier de chirurgien depuis longtemps, il a perdu sa fille et sa femme l'a quitté. Et pourtant, toutes deux habitent encore un peu cette grande maison. Alors pour ses dernières années, il réunit Hélène, une artiste, à qui il demande un portrait ; Béatrice, qui s'occupe des nuits en même temps qu'elle étudie ; Marc, qui jardine et partage les matins et Yolande, qui fera la cuisine. Chacun a sa clé, ses horaires et sa chambre - au cas où. Ils sont amenés à se croiser, mais fort peu. C'est Octave qui mène la danse. Et à son contact, pour chacun, d'étranges histoires remontent à la surface de leurs consciences. Des histoires de guerre en Afrique, des histoires de frère mort, des histoires d'amour, de pauvreté, de gène ou de liberté. Chacun apprend, se découvre ou se redécouvre. Octave aussi change, sa petite Claire est plus présente et les circonstances de sa mort, les pauvres souvenirs s'éveillent à nouveau. Tout ce qui était mort ou caché tend à se montrer, petit à petit. Tout s'ouvre, ça communique, c'est intime, infime et c'est pourtant là.

 
Que c'est beau cette écriture, cette narration fine, en ellipses.

 

"Dans le fond, il faudrait toujours acheter les journaux en retard, comme ça on se sentirait à l'abri des choses et on regarderait les "nouvelles" tranquillement même quand c'était des catastrophes"


"Il ouvre les yeux. Les étoiles au-dessus de sa tête sont mortes depuis longtemps. Pourtant, la beauté est là. Quand même. Bien sûr il y a un phénomène physique et des calculs précis qui permettent de savoir exactement comment la lumière se propage dans l'espace. Mais la beauté ? Ce que provoque en lui ce scintillement-là dans tout le noir, quel chiffre peut le mesurer ?"

 
"Il dit que la poésie aide au vif de la vie. Que les mots gardent vivant même quand on croit qu'on est déjà mort"

"Il se dit qu'œuvrer sauve de tout. Se concentrer totalement. Evacuer de sa tête de son cœur tout ce qui gène. Etre entièrement à ce qu'on fait. Et c'est tout. La belle expression. Oui, c'est vraiment "tout". Alors quelque chose s'ouvre. Une joie dans cette solitude. Et c'est ça qu'il a connu : cette joie-là, à nulle autre pareille, profonde, indicible [...] Les miracles prennent leur source dans la capacité à être totalement présent, il en est sûr"


"Quand je n'ai plus de refuge, je vais dans les mots. J'ai toujours trouvé un abri, là. Un abri creusé par d'autres, que je ne connaitrai jamais et qui ont œuvré pour d'autres qu'ils ne connaitront jamais. C'est rassurant, de penser ça"


"Ces moments ont existé. Ce bonheur qui a été vécu, rien ne peut faire qu'il ne l'ait pas été. Même la mort. La mort ne balaie rien. Le chagrin peut tout brouiller. Un temps. Comme à chaque fois que l'on est séparé de ceux qu'on aime. On se dit que plus jamais. Eh bien plus jamais, d'accord. N'empêche que ce qui a été est. A l'intérieur. Pour toujours"


"Est-ce qu’on peut perdre la faculté d’aimer tout près de soi ? Est-ce que pour faire son métier comme il le faisait, il fallait forcément que sa capacité d’amour se diffracte ? Est-ce que c’était pareil pour ceux que la fameuse foi en dieu faisait entrer en vocation ? Où loger ensuite l’amour des siens ? Comment réduire l’amour à une compagne, à une famille ? Sa famille, la vraie, c'était tous ceux qui se présentaient devant lui, ceux à qui il avait juré de porter assistance, quoi qu'il en coute"



lundi 13 décembre 2021

Le cœur de l'homme

Je clôture avec ce titre ma lecture de la trilogie de Jon Kalman Stefansson. A la fin du tome précédent, j'étais persuadée que l'aventure était finie, qu'il n'y avait que deux tomes, que je n'entendrais plus parler du "gamin". Alors imaginez ma joie de découvrir que j'allais de nouveau suivre ce personnage.

Jens et le gamin, rescapés de la tempête, se réveillent dans la belle demeure d'un médecin. C'est là qu'ils rencontrent Alfheidur, une beauté aux cheveux roux et aux yeux verts qui ne cessera d'habiter l'esprit du gamin. Remis de leur périple, ils regagnent le village. La vie semble reprendre tranquillement sauf que des lettres sont parties, ont été lues, ont changé des vies. Une femme a quitté son mari. Une autre croit qu'on se moque d'elle. Les mots du gamin ont un pouvoir qu'il découvre aux dépens des personnes. Rien n'a changé, tout a changé. Et Geirprudur, la riche et libre veuve qui accueille le gamin va aussi devoir faire des choix, coincée par les hommes riches du village.

Un troisième tome centré sur le village, sur les interactions entre les habitants, sur les différences sociales, donc différent des précédents qui étaient plutôt des quêtes et des voyages. Il est tout aussi riche et plaisant à lire, l'écriture, toujours aussi belle, et la force des mots toujours au centre de l'ouvrage. Un régal !

"Les besoins de l'homme ne sont pas légion : il lui faut aimer, se réjouir, manger, puis un jour il meurt. Pourtant, plus de six mille langues sont parlées à travers le monde, pourquoi doivent-elles être si nombreuses si c'est pour exprimer d'aussi simples désirs ? [...] Une caresse, un frôlement peuvent en dire plus que tous les mots du monde, c'est vrai, mais la caresse s'estompe au fil des ans et alors nous avons a nouveau besoin des mots, ils sont nos armes contre le temps, la mort, l'oubli, le malheur."

"On ne saurait vivre pour la seule raison qu'on n'est pas mort, ce serait une trahison. Il faut vivre comme une étoile qui scintille"


vendredi 10 décembre 2021

A suivre...

Cet ouvrage est celui d'une expérience photographique, artistique et littéraire de Sophie Calle. Dans Leviathan de Paul Auster, l'écrivain imagine le personnage de Maria, inspiré de Sophie. L'artiste décide alors de suivre les rituels du personnage et de vivre certains passage du livre. Un projet à la fois fou et simple : après tout, il n'y a qu'à suivre les indications. Dans la réalité, qu'est-ce que ça donne ?

Un livre en trois partis dont le point commun est la filature. Dans Préambule, on entre dans le carnet de Sophie via des photos de celui-ci. Ce carnet contient des textes datés, décrivant les filatures effectuées et les photos des personnes suivies. Dans la Suite vénitienne, Sophie décide de suivre Henri B. dont elle sait qu'il va passer du temps à Venise. Elle met d'abord un certain temps à le retrouver puis réussit à le suivre régulièrement avant de se faire reconnaitre. Dans La filature, c'est elle-même qui est suivie et qui débusque régulièrement le détective engagé. 

Une expérience étonnante, un peu malsaine, qui interroge sur la liberté.



lundi 6 décembre 2021

Brèves de solitude

Un peu déçue par ce roman de Sylvie Germain, mon billet sera court. 

A travers de multiples personnages présents dans un square peu avant le confinement, puis retrouvé chez eux pendant le confinement, l'auteur nous livre des bribes de vies, d'émotions. Il y a quelques interactions, des ruptures, des rapprochements mais finalement rien qui permette d'être avec les personnages. S'il fallait montrer la solitude et l'insaisissable de chacun, c'est gagné. Mais tout m'a paru bien moins profond et plus artificiel que ce à quoi nous a habitué l'auteure.