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lundi 23 février 2009

Princesses d'ivoire et d'ivresse


C'est Nibelheim qui m'a fait découvrir Jean Lorrain et ses étranges contes. Avouez qu'avec un titre pareil, je ne pouvais que craquer. L'atmosphère est fantastique, délicieusement archaïsante. On pense à Moreau en peinture, à Huysmans en littérature. Il y a du Baudelaire, il y a du XIXe finissant, se perdant dans des rêves antiques ou médiévaux, dont l'atmosphère délétère exhale ses derniers relents. Voici les titres des nouvelles en questions et les thèmes récurrents :

La princesse aux Lys rouges : Belle damoiselle dans un couvent, elle tue en décapitant les fleurs.
La princesse des chemins : Une belle femme errante, épousée et enfermée par un roi, regrette sa liberté. Grimaldine aux crins d'or : la beauté fatale enfermée par son mari ressemble à la vagabonde.
La princesse du Sabbat et La princesse aux miroirs : Deux femmes, deux princesses qui veulent être toujours jeunes et jolies, pétries d'orgueil. Elle se rendent chez des sorcières mais perdent leur image au sabbat.
Les filles du vieux duc : des jeunes filles fuient le palais. Tout comme Hylas. Ils s'échappent des volontés toutes puissantes pour errer sur les chemins. Légende des trois princesses est sur le même mode : fuite des jeunes femmes à la poursuite d'un amour indigne et traitre à leur patrie.
Narkiss : Un beau pharaon à l'image d'Isis, méconnaît son reflet. Enlevé et élevé dans l'oisiveté par des prêtres, il est victime, comme son acolyte grec, de son propre visage.
La fin d'un jour : Découverte d'un carnage à Constantinople.
Conte du bohémien qui refuse de chanter pour roi et émerveille le peuple : une métaphore de l'amour.
La princesse Ottilia : pauvre sourde et muette jouet des ambitieux.
La Marquise de Spolète épouse un vieux duc et se noie dans les fêtes : tout dérape le soir où avec trois amants elle joue Salomé.
L'inutile vertu : un homme refuse les plaisirs de la vie tout à la recherche d'un criminel à éliminer. Il vieillit.
Mélusine enchantée : conte de la belle femme serpent, revu et corrigé.
Mandosiane captive : une beauté de tissus, image de bannière se délite à la fin du Moyen-Age.
Oriane vaincue : la sirène vaincue par le christ.
Le Prince dans la foret : deux contes au même titre qui traitent de l'enchantement des rêves dont on ne se sort que par la douleur et de la quête du bonheur comme indifférence à la souffrance.
Conte des faucheurs : amour et mort fauchent devant Raymondin.
La princesse sous le verre : Version corrigée de la Belle au bois dormant endormie que chacun cherche à réveiller... horrible carnage et canonisation de l'endormie.
Neighilde : une reprise de la Reine des neiges.
La princesse Neigefleur : L'histoire de Blanche Neige centrée sur mauvaise reine. On retrouve le thème du miroir omniprésent dans les premiers contes.
Un recueil délicieux, poétique mais souvent peu riant. Ne vous attendez pas à un happy end, car la pourriture, le poison, le temps viennent tout détruire. Il y a un peu de la mort du grand Pan, des civilisations disparues et des maléfices anciens dans ces œuvres. C'est beau, souvent d'une intense pureté, je me demande à quel point Silhol s'est inspirée de ces textes, de cette plume...

2 commentaires:

  1. J'ai lu il y a quelques temps "l'inutile vertu" et j'avais apprécié cette réécriture déprimée des histoires de chevalerie. Il faudrait que je me procure le recueil !

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  2. Oui je suis certaine qu'il te plairait !

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