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lundi 3 avril 2017

Belle de jour

Gervex, Rolla, 1878
J'ai beaucoup aimé ce roman de Joseph Kessel. J'ai eu l'impression de lire une autre version de La petite dame de la grande maison. Ni pour les lieux, ni pour le thème, mais pour cette question de l'attirance sensuelle, au-delà de l'amour.

Séverine et Pierre Sérizy forment un joli couple. Il admire sa force et son énergie, elle est fascinée par son intelligence et sa douceur. Tout semble rouler. Mais dans la chambre conjugale, Pierre déplore la frigidité de son épouse. 
"Il met le goût de la chair jusque dans la folie et la mort. Et il n'y a pas d'art plus contagieux que le charnel. Tu n'es pas de mon avis ?
Comme elle tardait à répondre, il reprit pensivement :
-Tu ne peux pas savoir, c'est vrai".

Après une longue maladie, Séverine regoûte au monde. Elle vit de mondanités : diners, robes et promenades avec ses amies. C'est avec Renée qu'elle entend parler d'une jeune femme, Henriette, qui se rend dans des maisons de rendez-vous. Cela la trouble profondément.

Dans son entourage, elle est gênée par Husson, un ami de Pierre, qui aime la perversité, les jeux psychologiques. Lui, l'observe comme un petit animal curieux, endormi, qu'il cherche à stimuler. Mais il n'a pas vraiment besoin de le faire car Séverine est obsédée par cette idée des maisons de rendez-vous, à tel point qu'elle se rend dans l'une d'elles. Elle y sera connue comme Belle de jour. Et commence la découverte de la chair. Et le goût de l'avilissement, des ordres, de la brutalité. Et bientôt le plaisir charnel. 

Divisée entre ses sentiments pour Pierre et l'appel de ses sens, Séverine marche sur une corde raide. Et oscille entre l’apaisement et l'inquiétude d'être découverte, d'être entrainée toujours plus loin de sa vie bien rangée.

Est-ce par amour ou par haine des femmes et de la chair que Kessel écrit ce roman ? Avec ce roman, Kessel explore les tensions entre les sentiments et les sens, entre la tête, le cœur et le corps. Il crée une héroïne fascinante de naïveté et la suit le long de son apprentissage du corps, avec plus de bienveillance qu'Husson. L'engrenage qu'il nous présente est prenant pour le lecteur qui accompagne Séverine jusqu'à l'abime. 


2 commentaires:

  1. J'ai vu le film de Bunuel, qui est d'ailleurs très bien, mais je n'ai encore jamais lu Kessel. Il faudra que j'y remédie, car je crois que ça m'intéresserait !

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