Je terminerai ce mois anglais sur un essai de Virginia Woolf qui patiente depuis bien longtemps dans ma LAL. C'est un ensemble de conférences sur le sujet "women and fiction" ordonnées dans ce petit traité. La thèse de Virginia ? Il faut une pièce pour soi, que l'on peut fermer à clé, et 500 livres de rente pour qu'une femme puisse écrire.
Toutes les conférences ne m'ont pas intéressée de la même façon et j'ai trouvé le propos parfois redondant mais l'ensemble dessine une analyse passionnante de la condition des femmes, de leur accès à l'éducation et à l'écriture. Un essai féministe, qui ne manque pas d'ironie, à l'égard des hommes comme des femmes.
On commence d'abord par suivre une femme dans ses activités quotidiennes, un peu comme on a pu suivre Clarisse Dalloway. On voit ce qui est admis et ce qui ne l'est pas. Dans le cadre d'une université fictive, Oxbridge... Et entrer à la bibliothèque n'en fait pas partie. Qu'à cela ne tienne, il y a celle du British Museum. Où la majorité des livres sont écrits par des hommes. Oui, même -voire surtout - lorsqu'il est question de femmes.
Mais là où l'on entre dans le vif du sujet, c'est lorsque Virginia touche à Shakespeare et à Jane Austen. Elle imagine le tragique destin d'une sœur de Shakespeare. Et elle s'étonne de la force d'une fille de pasteur, qui a pu écrire au milieu d'un salon bruyant. Le chapitre sur les Bronte, Austen et Eliott est de loin celui qui m'a le plus plu. Je me suis délectée des images que Virginia nous propose et de l'innovation étonnante de ces bas-bleus. Par contre, elle aurait pu faire une petite place à d'autres dames, plus antiques comme Sappho, plus précieuses comme Mme de Scudéry ou Mme de Lafayette.
Enfin, elle s'attaque au cœur même du travail de l'écrivain, proposant que la qualité n'émane pas du sexe de l'auteur mais plutôt de sa capacité à se fondre entre eux. L'écrivain idéal est androgyne. C'est finalement ces derniers chapitres que je retiendrai. Virginia se demande si l'argent n'est pas plus important que le droit de vote pour les femmes. Je vous laisse réagir. Elle invite aussi à dépasser cette opposition entre hommes et femmes pour ne laisser paraitre que l'écrivain. Et invite tout un chacun à prendre un stylo, sans se soucier des résultats, simplement pour le plaisir d'écrire.
Comme souvent quelques extraits de la lecture :
"No force in the world can take from me my five hundred pounds. Food, house and clothing are mine forever. Therefore not merely do effort and labour cease, but also hatred and bitterness. I need not hate any man; he cannot hurt me. I need not flatter any man; he has nothing to give me. So imperceptibly I found myself adopting a new attitude towards the other half of the human race".
"'Women live like Bats or Owls, labour like Beasts, and die like Worms...'"
"In those words she puts her finger exactly not only upon her own defects as a novelist but upon those of her sex at that time. She knew, no one better, how enormously her genius would have profited if it had not spent itself in solitary visions over distant fields; if experience and intercourse and travel had been granted her. But they were not granted; they were withheld; and we must accept the fact that all those good novels, VILLETTE, EMMA, WUTHERING HEIGHTS, MIDDLEMARCH, were written by women without more experience of life than could enter the house of a respectable clergyman; written too in the common sitting-room of that respectable house and by women so poor that they could not afford to buy more than a few quires of paper at a time upon which to write WUTHERING HEIGHTS or JANE EYRE".
"Speaking crudely, football and sport are 'important'; the worship of fashion, the buying of clothes 'trivial'. And these values are inevitably transferred from life to fiction. This is an important book, the critic assumes, because it deals with war. This is an insignificant book because it deals with the feelings of women in a drawing-room".
"It was strange to think that all the great women of fiction were, until Jane Austen's day, not only seen by the other sex, but seen only in relation to the other sex. And how small a part of a woman's life is that; and how little can a man know even of that when he observes it through the black or rosy spectacles which sex puts upon his nose".
"Thus, when one takes a sentence of Mr B into the mind it falls plump to the ground--dead; but when one takes a sentence of Coleridge into the mind, it explodes and gives birth to all kinds of other ideas, and that is the only sort of writing of which one can say that it has the secret of perpetual life".
"'The poor poet has not in these days, nor has had for two hundred years, a dog's chance...a poor child in England has little more hope than had the son of an Athenian slave to be emancipated into that intellectual freedom of which great writings are born.' That is it. Intellectual freedom depends upon material things. Poetry depends upon intellectual freedom. And women have always been poor, not for two hundred years merely, but from the beginning of time. Women have had less intellectual freedom than the sons of Athenian slaves. Women, then, have not had a dog's chance of writing poetry. That is why I have laid so much stress on money and a room of one's own".
J'avais étudié ce texte en littérature anglaise au lycée, j'avais adoré !
RépondreSupprimerA bientôt j'espère ! :)
Il m'attend depuis un moment celui-là... on dirait qu'il me fait un peu peur!
RépondreSupprimerPas de raison d'avoir peur, il se lit bien
Supprimer