jeudi 30 juillet 2020

La mort viennoise

C'est un roman étonnant et saisissant que celui-ci. Ecrit par Christiane Singer, dont j'apprécie les essais comme les romans, il nous plonge dans un temps d'épidémie. C'est de saison.

En 1679, à Vienne, chez les nobles, plus spécialement chez Balthasar de Lichtenburg, on mange, on chasse, on gaspille. C'est là que le jeune Johannes préfère traîner avec les palefreniers qu'avec les siens. Quand à Éléonore, sa mère, elle ne fait que perdre des enfants et supporter son mari avec froideur. 
On découvre cette famille lors d'un dîner particulièrement inquiétant, après un suicide. On parcourt Vienne avec elle, on note la morgue et le mépris des riches, on découvre l'horreur de la vie des plus pauvres. Bref, c'est peu ragoutant. Et puis, survient la grande faucheuse, la peste, l'épidémie, qui ravage la cité, faisant fuir les riches, se nourrissant des pauvres, enterrant des hommes par milliers. Mais ce temps de mort est aussi un temps de vie, de vie plus féroce, dévorée, passionnée. Un temps où la mort met tout le monde à égalité, poussant certains à des folies. 

Roman de contrastes, d'une société décadente et gavée, il est plaisant à lire par son écriture et sa narration. Attention, âmes sensibles, il y a de la violence dans cet ouvrage. 


lundi 27 juillet 2020

Vienne au crépuscule

Voici un roman d'Arthur Schnitzler qui quitte enfin ma PAL. Bon, ce ne fut pas ma meilleure lecture du mois, loin s'en faut ! 



Bienvenue à Vienne, auprès de Georges von Wergenthin, un compositeur qui vient de perdre son père. Un artiste, un musicien, bientôt chef d'orchestre, qui aime les femmes. Un hédoniste, qui peut voyager, composer, profiter de la vie tout en regardant son petit nombril. Il s'interroge beaucoup sur lui, mais semble ne jamais choisir, se laissant couler dans des choix faits par les autres. C'est patent lorsqu'il se lie plus longuement avec Anna, jusqu'à avoir un enfant ensemble, hors mariage.

Roman d'un homme et d'un milieu, une haute bourgeoisie aveugle et autocentrée, elle montre un monde en fin de course, celui d'une belle époque qui a trop bien vécu. On croise aussi la question de l'antisémitisme mais ce n'est pas forcément ce qui a retenu mon attention dans ce roman trop bavard.


samedi 25 juillet 2020

Un art de l'attention

C'est le titre du livre de Jean-Yves Leloup qui a attiré - justement - mon attention. Vous avez certainement déjà lu ou vu des ouvrages sur ce thème hyper à la mode, notamment autour d'une économie de l'attention. Ici, rien de tel, ou plutôt, c'est abordé autrement. 
A travers des textes courts, on découvre la pensée du théologien et philosophe, qui invite à retrouver l'écoute du monde et de soi. Et cela peut être dans la prière mais surtout à travers l'attention que l'on porte à nos actes, à nos émotions, à nos pensées, aux autres... C'est un livre religieux et philosophique, un livre chrétien. Un livre ouvert sur d'autres traditions chrétiennes que celles retenues comme l'évangile de Thomas ou de Marie - qui m'intriguent beaucoup. Un livre qu'il faut prendre le temps de lire, sereinement, sans le dévorer. Bien sûr, j'y ai glané beaucoup de phrases inspirantes !

"Etre ou ne pas être dans "le corps du Christ" n'est pas une question "d'étiquette" mais de comportement. Lorsque je demandai au Dalaï-Lama : "Quelle est pour vous la meilleure religion ?" - je pensais qu'il allait me répondre le bouddhisme - il répondit : "La meilleure religion c'est celle qui vous rend meilleur !""
"A celui qui veut vivre 
attentivement
il sera donné en plus
de ses mille et une raisons de rire
de ses mille et une raisons de pleurer
l'émotion pure et permanente
d'exister..."
""Les biens les plus précieux
ne doivent pas être cherchés mais attendus" :
c'est de la qualité de notre attente
ou encore de notre désir
que naît la qualité de notre attention. 
L'attention est alors 
un autre nom pour l'Amour,
quand celui-ci ne se contente pas
d'émotions et de bonnes volontés
mais devient l'exercice quotidien
d'une rencontre avec ce qui est,
avec ce que nous sommes."
 
"Ce qui donne valeur et efficacité à une activité, c'est l'attention avec laquelle on l’exécute [...] Ainsi l'attention conduit à la connaissance et la connaissance conduit à l'adoration"
"Le péché (harmartia) pour les anciens est en effet non seulement oubli de l'Être que nous sommes, mais oubli de notre capacité "d'aimer comme l'Amour incarné a aimé", perte de notre ressemblance avec Dieu. Être attentif, c'est garder le cœur miséricordieux en toutes circonstances, c'est ce qui nous garde en Présence de l'Être."
"Etre attentif avec miséricorde aux êtres et aux choses, c'est leur donner le droit à leur impermanence mais aussi à leur capacité d'évoluer, de se transformer et de changer."
""Qu'ai-je à faire de ce qui n'est pas éternel ?" [...] Sans doute avait il gardé une mentalité de riche, et pensait-il que les réalités spirituelles, comme les autres peuvent s'acquérir. il voulait "avoir" la Vie éternelle sans être certain que ce nouvel avoir mérite qu'on laisse pour lui tous les autres biens. "Vendre tout ce qu'on possède pour posséder la perle précieuse." Or, il ne s'agit pas "d'avoir la Vie éternelle", mais d'être vivant, d'être un avec "Celui qui Est" : la Vie en nous ; et pour cela, d'être libre à l'égard de tous nos avoirs, que ceux-ci soient matériels, affectifs, intellectuels et même spirituels"
"Le bonheur d'un homme libre ne dépend pas des circonstances, mais de ce qu'il fait des circonstances en y introduisant de la conscience et de l'amour. Peut-être éprouvera-t-il alors quelque chose du bonheur "souverain" de celui qui a pu dire : "Ma vie, on ne me la prend pas, c'est moi qui la donne"".
"L'Amour est le seul vrai Dieu
Qui ne soit pas une idole.
On ne peut le garder
Qu'en le donnant"

jeudi 23 juillet 2020

En finir avec les idées reçues sur les pauvres et la pauvreté

Je continue à m'informer sur les inégalités sociales, et à creuser les publications d'ATD Quart Monde ! Avec cet ouvrage, l'association passe en revue plein de préjugés - 88 exactement - organisés en idées reçues sur les pauvres et sur les solutions pour en finir avec la pauvreté.

C'est par exemple "Les pauvres coûtent cher", "On peut gagner plus au RSA qu'avec le SMIC", "Les sans-abri ne veulent pas travailler", "Les immigrés prennent des emplois aux français" ou "Il vaut mieux placer les enfants pauvres"...
Chaque affirmation est ensuite expliquée, accompagnée par des chiffres et des situations concrètes. C'est très pédagogique et instructif !



"Les pauvres font tout pour profiter au maximum des aides
Au contraire, beaucoup ne sollicitent pas les aides auxquelles ils ont droit. Pour différentes raisons (volonté de ne pas dépendre de l'aide publique, complexité des démarches, manque d'information, souhait de ne pas être contrôlé...), une partie des personnes éligibles à différentes aides n'en font pas la demande. C'est ce qu'on appelle le non-recours. Les taux de non-recours sont les suivants : 50 % en moyenne pour le RSA (68 % pour le RSA activité, 35 % pour le RSA socle), 29 % pour la CMU complémentaire, 68 % pour le tarif première nécessité d'EDF, 62 % pour le tarif spécial solidarité de GDF, 50 à 70 % pour les tarifs sociaux dans les transports urbains." 

"Les pauvres sont des fraudeurs 
Ils fraudent beaucoup moins que les autres. Il ne s’agit pas de nier la fraude aux prestations sociales, ni la nécessité de lutter contre elle. Mais elle est très faible par rapport aux autres types de fraudes – notamment la fraude fiscale -, auxquels les discours stigmatisants s’intéressent beaucoup moins [...] 60 millions d’euros de fraude au RSA en 2009 pour environ 2 millions de bénéficiaires, cela représente en moyenne 30 euros par personne et par an. "la fraude des pauvres est une pauvre fraude", estimait le Conseil d’Etat en février 2011. Dernier point : en face des 4 milliards de fraude estimée aux prestations sociales, alignons les montants estimés des non-recours à ces mêmes prestations : 5,3 milliards pour le RSA, 4,7 milliards pour les prestations familiales et le logement, 828 millions pour l’allocation personnalisée d’autonomie (APA)…, soit au total environ 11 milliards "économisés" chaque année par l’Etat parce que, pour différentes raisons, une partie des personnes qui ont droit à ces prestations ne les sollicitent pas. Au bout du compte, malgré la fraude, l’Etat est donc gagnant d’environ 7 milliards d’euros par an !"

"Ce sont les étrangers les plus pauvres qui immigrent en France
[...] Les migrants disposent de ressources importantes, tant en termes financiers, comme en témoigne le niveau de transferts de fonds à destination des pays en développement [...] qu'en termes de capital humain puisque près d'un tiers des migrants récents dans les pays de l'OCDE sont diplômés du supérieur contre moins de 6% en moyenne dans leur pays d'origine"

mercredi 22 juillet 2020

Une femme d'imagination et autres contes

Quelques suites du mois anglais avec ces nouvelles de Thomas Hardy, que je ne pense pas avoir lu depuis Tess. Dommage car le roman m'avait bien plu... Et plus que les quatre nouvelles de ce recueil. Toutes sont des histoires d'amour compliquées ou contrariées, souvent du côté des femmes, qui se prennent quand même pas mal la tête. Elles sont bien écrites et nous transportent dans une campagne anglaise en mutation, mieux reliée aux villes. 

Le hussard mélancolique de la Légion germanique : Phyllis, une jolie jeune fille, est fiancée à Humphrey. C'est un peu son premier et seul contact avec le monde car elle vit avec son père dans un endroit très reculé. Quand un régiment arrive à proximité, tout change...

Le veto du fils : Sophy s'est mariée au dessus de sa condition, avec un pasteur, Mr Twycott. Fuyant le suicide" social à la campagne, le couple gagne Londres. Lorsque Sophy se retrouve veuve, Sam, un ancien amoureux, réapparaît aussi. Mais c'est sans compter sur la dureté de son fils...

Le violoneux des contredanses : Les pieds de Caroline ne peuvent s'arrêter de danser lorsque joue "Balai-à-franges". Ce violoneux la hante, au point qu'elle refuse son bon ami Ned. Quelques années plus tard, ils renouent.

Une femme d'imagination : Mrs Marchmill, en villégiature avec son mari et ses enfants, loue une maison habitée par Robert Trewe, un poète. Elle-même se dédie à la poésie et a vu ses écrits publiés auprès de ceux du jeune homme. Un intérêt presque obsessionnel s'empare de la jeune femme d'imagination. 


mardi 21 juillet 2020

Enterrement de vie de garçon

Ce titre de Christian Authier est sur ma LAL depuis les débuts de ce blog. Croisé à la bibliothèque, j'ai emprunté ce livre pour les vacances. Il est vite lu et sera certainement vite oublié. 

Il s'agit des années 80-90 à Toulouse, entre le lycée et les études d'un groupe d'amis. Parmi eux, le narrateur et Eric, cinéphiles. Eric, on pourrait croire que c'est un grand dur. En fait, il est en rémission et en soin sans cesse dans une course contre le cancer. Il apparaît ici et là dans ce roman qui est celui d'une époque, celle des années Mitterrand, de la fin du bloc de l'est, sur fond de salles obscures et de bars, dont beaucoup ont disparu. Roman nostalgique d'un temps où les sandwicheries et les franchises n'envahissaient pas les rues. Histoire d'amitié brisée, que le narrateur ne parvient pas à oublier. Histoire d'amour en pointillés, avec une Emmanuelle dont on ne sait rien. Roman sympathique mais qui aurait gagné à être un peu plus épais.

 

lundi 20 juillet 2020

Le grand soir

Yes, les sorties de PAL se poursuivent avec ce roman de François Dupeyron, présent dans depuis des années sur mon chevet et dévoré en une soirée. 

Connaissez-vous Gustave Courbet, ce peintre vivant et gouailleur ? Ce roman est l'occasion de le rencontrer, au soir de sa vie, alors qu'il s’émeut de la ressemblance d'une prostituée avec sa belle irlandaise, Jo. Et il plonge dans ses souvenirs, ceux de son amour pour la belle rousse, qu'il peint sous de nombreux angles, et qui l'a quitté il y a bien longtemps. C'est aussi un retour dans sa peinture, son musée Courbet, et surtout la Commune, ses amours avec Adèle et son engagement politique. 

Bien sûr, c'est un homme fatigué, déçu et ruiné, encore un peu ivre de la veille qui nous parle. Un homme mis en prison pour avoir demandé la démolition de la colonne Vendôme qu'il doit désormais rembourser. Un exilé qui n'arrive plus à peindre. Un petit garçon qui cherche toujours l'approbation de son père ou du moins un peu de tendresse. C'est cette variété que nous offre ce livre, sous le rythme rapide et argotique de Courbet. Ce n'est pas vraiment une biographie, ce n'est pas complètement romancé... à vous de voir !


J'ai aimé l'évocation de la Commune, les passages qui concernent la peinture. Le style n'est pas mon préféré mais j'ai réussi à m'y faire... Sympa pour ceux qui aiment ce peintre !

jeudi 16 juillet 2020

Matin de roses

Départ immédiat pour l'Egypte avec ces trois nouvelles de Naguib Mahfouz, dans des quartiers du Caire qui ont changé. C'est plein de mélancolie et de photos sépias, d'histoires de voisinages et de voisins. A vrai dire, tout est empreint de nostalgie, peut-être trop pour moi !


Oumm Ahmad
Oumm Ahmad est une figure du quartier d'Al-Abbasseyya. Cette femme vive et forte connait toutes les histoires du quartier : marieuse, spécialiste des affaires conjugales, elle entre dans toutes les maisons, surtout celles des notables. Et en raconte les secrets. 
"Si je fais appel à mes souvenirs, je ne trouve que des images éparses qui ne veulent rien dire. Une belle qui se montre à une haute fenêtre, trois autres qui débouchent ensemble d'une voûte, une calèche qui se balance sur la place tel un palanquin sous le poids d'une femme. Ne reste de la vie foisonnante d'antan dans le vieux quartier que les souvenirs d'enfance : des paysages flous, des voix qui ne sont plus, une tendresse infinie et un cœur qui bat chaque fois que viennent le remuer les parfums des souvenirs." 
"Nous errâmes ensemble dans un monde peuplé de morts. Combien de gens étaient partis ! C'était comme si les visages n'avaient jamais resplendi de tout leur éclat, comme si les gorges n'avaient jamais vibré de rires. Voilà la conteuse d'histoires, le médecin de l'amour, du sexe et du bonheur, allongée sur un vieux lit, et devenue un fardeau quotidien pour la personne la plus proche à son coeur. Que valent les histoires, Oumm Ahmad, puisqu'elles ne font que se répéter, d'une manière ou d'une autre ?"
Matin de roses
On fait le tour des familles de la rue Al-Radwân, dans le quartier d'Al-Abbasseyya, entre le vieux quartier aux petites rues et le nouveau quartier. Pour chaque famille, on découvre une position sociale, des histoires de mariage et d'ambitions.

Dieu bénisse ta soirée
Un jeune retraité fait le triste bilan de sa vie. Il est désespéré de solitude. Et pourtant, il avait rencontré des jeunes femmes. Au soir de sa vie, une nouvelle histoire est-elle possible ?


lundi 13 juillet 2020

Le bleu des abeilles

Ce joli livre de Laura Alcoba parle de migration, de langue française, de découverte. 

La narratrice quitte l'Argentine où son père est en prison pour rejoindre sa mère en France, au Blanc-Mesnil. Elle apprend un peu le français avec Noémie, sa prof d'Argentine. Et puis, elle part et correspond avec son père autour d'une lecture commune, La vie des abeilles de Maeterlinck. Notre narratrice découvre l'école, et surtout les joies de la phonétique française. Elle s'émerveille de la langue. Et puis, elle découvre la montagne :

"Jamais je n'avais vu autant de neige d'un coup. Là-bas, tout était blanc, partout, pas seulement sur les sommets mais aussi sur le bord des routes et autour de la maison, un chalet tout en bois, comme j'en avais vu dans les livres. Sauf que là, c'était pour de vrai, et j'y étais - c'est la première impression que j'ai eue, d'être entrée dans l'image d'un livre, de m'y être glissée, l'air de rien. Ça alors ! Tout n'était que blanc et les gens étaient dedans. Ce qui n'avait décidément rien à voir avec la neige que j'avais déjà connue, avant c'était de la rigolage. Là-haut, c'est comme d'être tout au fond d'un pot de crème fraîche, ou alors une toute petite chose au milieu d'un plat de purée"

"L’essentiel, avec le reblochon, c’est de ne pas se laisser impressionner. Il y a clairement une difficulté de départ, cette barrière que l’odeur du fromage dresse contre le monde extérieur. Mais il ne faut surtout pas se méprendre à son sujet. Ce n’est pas de l’agressivité de sa part, c’est juste la manière qu’a le fromage de dire : as-tu vraiment envie ? es-tu prêt ? Cette senteur, c’est ce qu’il a trouvé pour être là, pleinement – c’est qu’il ne veut pas être avalé sans qu’on s’en rende compte, être gobé comme si de rien n’était"

Je crois que c'est le passage que j'ai préféré parmi toutes les belles découvertes de la petite fille, et elles sont nombreuses ! Une lecture jolie et sympa.



samedi 11 juillet 2020

Sous le soleil jaguar

J'aime beaucoup les romans d'Italo Calvino mais ces nouvelles m'ont déçue. Nouvelles sur les sens, elles semblent partir dans tous les sens... Peut-être parce qu'elles n'ont pas été achevées ?

Le nom, le nez. Il cherche une femme à son parfum, parfum perçu lors d'un bal masqué. Quelle est cette fragrance et qui est cette femme ? L'odorat réveille des habitudes anciennes, on plonge dans les origines de l'homme et dans une joyeuse nuit d'ébriété, toujours grâce à ce sens.

Sous le soleil jaguar. Communion de goûts dans un voyage au Mexique, un couple se retrouve sans cesse autour de la table pour vivre de l'intensité des saveurs. Et si la plus grande intensité se trouvait dans la chair humaine ? Entre sacrifices des peuples anciens et repas comme sacrés, la bonne chair est centrale dans cette nouvelle.

Un roi à l'écoute. Un puissant sur son trône n'a d'autre rôle que de tendre l'oreille. Ecouter les conseillers, les plaintes et les nouvelles, écouter la voix d'une femme qui chante, écouter le bruit de la guerre et des complots. Histoire de pouvoir et de paranoïa, c'est la plus plaisante des trois. 

Vous l'avez compris, c'est un recueil qui ne mérite pas le détour. Il y a bien d'autres ouvrages plus chouettes, à commencer par Si par une nuit d'hiver un voyageur ou Le baron perché...


mercredi 8 juillet 2020

La Joie

Bon, j'ai eu du mal avec ce livre de Bernanos. J'ai eu du mal à la suivre - mais je n'ai pas lu L'imposture qui le précède. Et j'ai trouvé le roman lent et alambiqué.

Tout tourne autour de Chantal de Clergerie, une jeune fille mystique, belle et pure, entourée de personnages qui ne la comprennent pas et ne pensent qu'à leurs intérêts. Son père brigue des honneurs. Sa grand-mère est folle et s'énerve autour d'un trousseau de clés. Chez les serviteurs - oui, on est dans la bonne bourgeoisie - c'est assez tendu, notamment autour du nouveau chauffeur russe, Fiodor. Quant aux visiteurs de cette villa normande en plein été, ils jouent les tentateurs ou les testeurs de la sainteté de la jeune fille. 

Roman sur le mysticisme, qui joue avec nos nerfs et ceux des personnages pour des prunes, qui traîne en lenteur sous un soleil de plomb... Pas ma tasse de thé !


lundi 6 juillet 2020

Où roules-tu petite pomme ?

Ma première lecture de Léo Perutz remonte... Je renoue avec lui avec cette seconde lecture qui me laisse un souvenir moins marquant que la première. 

On y suit Vittorin, de retour du front russe, où il a été prisonnier. Avec d'autres, il jure de se venger d'un officier russe qui les a maltraités. Mais à mesure que s'éloigne l'ombre de la guerre, le groupe se défait et la vengeance s'éloigne. Seul Georg Vittorin s'acharne à vouloir poursuivre Selioukov. Abandonné des autres, en décalage avec sa famille, il quitte Vienne et son amie pour rejoindre la Russie où la guerre règne toujours. D'aventures en aventures, des rouges aux blancs, il passe dans tous les camps pour rechercher son bourreau. Et finit par faire le tour de l'Europe pour le retrouver. 

Une histoire de vengeance qui finit mal, qui laisse un goût amer, mais portée par une plume sympathique, qui s'interroge sur ce temps de l'entre-deux-guerre. Tout le monde est en paix et pourtant, les balles sifflent toujours.


vendredi 3 juillet 2020

Le jour où la Durance

C'est une amie qui m'a parlé de Marion Muller Colard. J'ai entendu une de ses interviews et, très vite, j'ai eu envie de la lire. 
Dans ce roman, on suit Sylvia, une mère qui vient de perdre son enfant. Une femme qui ne pleure pas, ou ne pleure plus. Une femme qui se croit presque soulagée de cette perte. Car Bastien, lourdement handicapé depuis la naissance, elle le soigne depuis plus de 30 ans. Rien n'habite son corps, rien n'éclaire son regard. Bastien ne réagit jamais. Sylvia le promène, le lave, le nourrit, le masse seule, avec son mari, depuis qu'il est né.
C'est donc Clothilde, la sœur de Bastien, qui prend l'enterrement en main. Et Clothilde, elle pleure. Elle regrette Bastien, elle jouait avec lui, même s'il ne répondait pas, elle l'aimait. 
Sylvia, entre le moment du décès et l'enterrement, est comme pétrifiée. Elle ne ressent pas. Elle agit automatiquement, au point de risquer de se noyer dans la Durance qui elle, ne cesse de se gonfler d'eau et déborde. Et Sylvia, peut-elle laisser déborder un trop plein ? 

Entre présent et passé, la mort de Bastien réveille des souvenirs d'enfance, des drames, des joies aussi. Et s'il avait une place, une autre place que celle qu'on imaginait. Et s'il donnait du mouvement aux autres ce Bastien ?

Sobre, précis dans son écriture, c'est un roman profond et beau sur le deuil, sur la force du vivant.