mercredi 29 mars 2017

Le rosier de Madame Husson

Voilà très longtemps que je n'avais lu des nouvelles de Maupassant. Je me rappelle les dévorer au collège, empruntant sans cesse les volumes de la bibliothèque municipale. Et puis à nouveau en prépa. Et depuis, rien ou très peu. 


Et pourtant, c'est toujours agréable une excursion avec Maupassant. Qu'elle soit à Paris ou en province, comme dans ce recueil, on y croise toujours des personnages intéressants, amusants, en proie à un problème. Je ne suis cependant pas certaine de vous recommander cette lecture, car bien qu'agréable, elle m'a paru assez banale quoi que pleine d'humour et de situations cocasses.

Le Rosier de madame Husson. Histoire d'un jeune homme que l'on couronne du prix de la vertu.
Un échec. Repérage d'une jeune femme à séduire lors d'un voyage... et déconvenue.
Enragée ? Craintes d'une jeune femme lors de son voyage de noces.
Le Modèle. Pourquoi ce peintre célèbre a-t-il épousé une harpie ?
La Baronne. La baronne Samoris cherche un ami, par le biais d'une oeuvre d'art...
Une vente. Deux hommes sont jugés pour avoir tenté de tuer l'épouse de l'un d'eux. Une histoire d'ivrognes sympathique.
L'Assassin. Un garçon très droit découvre que sa femme le trompe.
La Martine. Benoist tombe amoureux de la Martine. Qui l'aime aussi beaucoup !
Une soirée. Un militaire cherche un bordel pour se distraire dans une triste ville de province.
La Confession. Un militaire trompe sa femme un soir d'ivresse, et ne le supporte pas.
Divorce. Se marier sur petites annonces, n'est-ce pas risqué ?
La Revanche. Quand un divorcé recroise son ex-femme et la trouve finalement pas mal.
L'Odyssée d'une fille. Triste histoire d'une fille travailleuse et naive dont les hommes abusent.
La Fenêtre. Mr de Brives et Mme de Jadelle vont-ils se marier ? Pour le tester, la jeune veuve l'invite chez elle et le met sous surveillance !


lundi 27 mars 2017

Du bon usage de la lenteur

Ce livre de Pierre Sansot trainait sur ma LAL depuis un bout de temps. Comme je sens que tout va trop vite pour moi en ce moment, j'ai pris un peu de temps pour le lire, cherchant à ramener un rythme moins fou dans ma vie. Mais à vrai dire, j'ai l'impression que l'auteur nous parle d'un temps perdu, un temps où l'on prend le temps, un temps sans les sollicitations constantes d'internet et des smartphones, un temps plus apaisé, plus choisi. Pour vous faire entrer un peu dans ce texte, commençons par des citations : 

"Ce qui est nouveau, c'est que l'agir (qui dépasse les frontières du travail) apparait aujourd'hui comme une valeur supérieure, comme si, faute d'agir, un individu s'exténuait et disparaissait. De ce fait, les rêveurs, ceux qui contemplent ou qui prient, qui aiment silencieusement ou se contentent du plaisir d'exister, dérangent et sont stigmatisés".
"Prier, c'est comme emprunter dans les ténèbres un chemin sans raison et espérer qu'une faible lumière nous assurera que nous ne nous sommes pas égarés"
"L'avoir, le pouvoir, le valoir inquiéteraient chacun d'entre nous. L'avoir parce que la possession nous met à l'abri du besoin et qu'il étoffe notre identité. Mais nous pouvons aussi nous dispenser d'exister par nous-mêmes quand nos biens semblent répondre pour nous et c'est souvent en exploitant nos semblables que nous augmentons notre capital. Le pouvoir. L'homme est un "je peux", un ensemble de capacités sensori-motrices ou intellectuelles. Le monde cesse de m'être étranger, voire hostile, quand je le maitrise. Seulement, notre liberté se heurte à d'autres libertés et nous croyons que notre choix se limite à soumettre ou à être soumis. La servitude de quelques-uns de nos semblables nous assurerait de notre pouvoir. Le valoir. La faveur dont nous jouissons auprès des autres hommes authentifie notre réussite, notre excellence. De là, nos tentatives pour séduire, corrompre, nous imposer, et l'idée que notre être se confond avec l'image que l'on a de nous. Ces analyses montrent qu'il existe un effet d'entrainement auquel il est difficile de résister. Je suis sans cesse tenté d'avoir plus, de pouvoir davantage, de valoir mieux, et ceci à la suite d'une fragilité affective essentielle à notre condition. La modération, attitude de fermeté, de vigilance, de résistance à l'égard de notre pathos, peut seule nous détourner de la folie et de la barbarie. Quand l'homme est habité par une légitime ambition, il lui faut souvent chasser les mauvais démons qui l'assaillent. Il est vrai qu'il existe des attitudes plus nobles. Si j'étais sûr de ma valeur, je n'accumulerait pas les signes de distinction sociale. Si je m'appréhendais comme une liberté entière et indéfectible, je ne chercherais pas à asservir les autres. Nous évoquerions la sainteté au regard de laquelle les marques de la réussite sont peu de chose, la générosité qui me donne la conscience d'être libre et d'avoir à respecter la liberté des autres pour entamer avec eux un dialogue d'égal à égal. Seulement, notre condition ordinaire passe par des compromis, des luttes gagnées ou perdues, des libertés octroyées puis refusées."
Paraguay, Santa Rita
"La conversion en matière de religion, d'art, de philosophie opère avec la même brutalité, même si elle n'est pas l'effet d'une stratégie. Comment un renversement radical entre l'avant et l'après pourrait-il se produire s'il n'y avait pas une dévaluation totale et au fond injustifiable de ce qui auparavant nous tenait à coeur ? Désormais Dieu et non point les biens de la terre, désormais le ravissement esthétique et non point la frivolité des voluptés ordinaires. Désormais la recherche ardue des fondements, du fondamental et non point des à-peu-près de ce qui est le plus probable".
"Un homme libre c'est un individu qui prend conscience des nécessités qui pèsent sur lui et qui tente de les contrarier, ou mieux, de les utiliser pour s'épanouir. Il se trouve que l'aliénation par le travail n'est pas seule à entraver la destinée d'une personne ou d'un pays. Elle peut-être dépossédée d'elle-même en ce qui concerne sa parole, ses désirs, par toutes sortes de confiscations, de manipulations, par une idéologie diffuse dont il faut se départir. La culture n'est pas un luxe, un divertissement comme on l'a souvent répété, mais une tâche pour être soi-même et pour que les autres deviennent eux-mêmes. Elle n'est pas seulement un ensemble de biens dont nous disposerons pour notre plus grand bonheur. Elle nous engage dans un processus de création, soit pour inventer par nous-mêmes, soit pour accueillir, achevant ce qui nous est proposé".
"Cette entreprise culturelle chercherait-elle à contrôler, à identifier, à pourvoir d'un statut, à occuper des hommes, et cela de leur prime enfance à leur vieillesse, ce qui constituerait une prise en charge, sinon une prise en main, elle aussi sans précédent, d'une population tout entière ?"
"Ces observations ne mettent pas en cause toute forme de politique culturelle. Elles nous incitent à être moins optimistes et nous laissent entendre que nous nous y prenons mal en dirigeant outrageusement nos projecteurs sur quelques phénomènes spectaculaires, en mesurant les progrès de la culture au nombre de ceux qui, prétend-on, y accèdent, en travaillant dans l'urgence, la précipitation, en bourrant les programmes, en cédant à cet acharnement que nous avons mis à exploiter la terre, en multipliant les festivals - et non point en nous montrant plus modestes, en pactisant avec les lenteurs de la durée sociale et la diversité des trajets individuels, en faisant sa part au silence, à la solitude, au retrait"
J'ai bien sûr trouvé un intérêt plus grand à lire le chapitre sur "La fébrilité culturelle", un thème qui me travaille depuis des années. Pourquoi tant d'événementiel, d'expos qui se ressemblent, de marketing dans la culture alors qu'elle pourrait irriguer toute notre société, nous aider à mieux vivre ensemble, à nous rencontrer, à nous épanouir... Qu'elle est bien plus centrale qu'un simple loisir et qu'elle vaut bien plus que tout ce que les bradeurs de culture veulent nous faire croire. 

Mais j'ai aussi beaucoup aimé la première partie de l'essai, "Pour parer aux empressements du temps" avec des chapitres sur l'ennui, flâner, attendre, écrire etc. J'ai eu l'impression de redécouvrir un monde qui, bien que pressé, sait prendre son temps, a de la place pour l'imprévu, ne se gave pas de sorties, de conférences, de cours de sport, d'apéros, de séries, de divertissements qui ne nourrissent pas.

Une lecture intéressante donc, mais qui semble quasi inaccessible, comme si l'accélération et l'emballement du monde ne pouvait que se poursuivre, plus vite. Et que le ralentissement était impossible.

lundi 20 mars 2017

Le Puits

J'avais lu pas mal d'avis sur Le Puits d'Ivan Repila sur les blogs. J'ai notamment souvenir d'un billet d'Yspaddaden. De la tête de gondole dans ma bibliothèque, il a rejoint mon sac à main. Et il a été lu en une soirée.

Pour ceux qui auraient raté les autres billets, c'est l'histoire de deux frères, le Grand et le Petit. On les rencontre au fond d'un puits. On est à la fois dans la caverne ou dans la grotte. On ignore comment les frères sont arrivés là. Ils élaborent des stratégies pour tenter d'en sortir. C'est surtout le Grand qui bosse. Il se muscle, il gère la nourriture, il réchauffe le Petit. Mais la tension s'installe vite. Le Petit a des idées bizarres, n'a pas envie de respecter les règles, est faible, malade, sombre dans la folie, dans le mutisme... Et les idées de cannibalisme, de violence, de sacrifice, de suicide et de trahison couvent. Sans parler des loups qui veulent dévorer les prisonniers, des personnes qui observent les frères dans la nuit.

Brr, ça fait froid dans le dos.

Aux allures de conte cruel, ce court roman à la fois très réaliste et hautement symbolique m'a laissée perplexe. Que veut on nous dire avec cette histoire ? Quel symbole voir dans ce puits, dans cette mère absente ? Et dans les deux frères avec leurs rapports de force ? Certes, je reconnais Grimm, Platon et la Genèse, mais après ? 

Source de la Douix

vendredi 17 mars 2017

C'est encore mieux l'après-midi

Voilà un boulevard très sympathique de Ray Cooney sur les planches du théâtre Hébertot

C'est encore mieux l'après-midiHôtel de l’hémicycle, à quelques pas du palais Bourbon, Richard Marchelier, député, attend sa maîtresse, Stéphanie. Il lui faut d'abord se débarrasser de sa femme, qu'il envoie au théâtre, puis réserver une chambre pour la nouvelle venue. Il confie cette mission à Georges, son assistant. Qui n'est pas très à l'aise dans ce genre de mission. Et fait s'enchainer les quiproquos. Il va falloir aux deux hommes un sens de l'à-propos et une imagination débordante pour justifier les aberrations auxquelles ils parviennent ! Car il ne faut pas que Christine croise Stéphanie.


Le duo porté par Sébastien Castro et Pierre Cassignard fonctionne bien : le premier tout en flegme et en naïveté, le second arrogant et manipulateur. Tout se joue autour d'eux, les femmes étant plutôt secondaires et sans une personnalité très développée. Est-ce pour étoffer son personnage que Lysiane Meis minaude autant ? Ou est-ce le couple Marchelier (Pierre Cassignard et Lysiane Meis) qui a besoin d'en faire trop ? En tout cas, leurs premiers échanges dans le hall de l'hôtel m'ont paru très surjoués. Mais très vite, la pièce prend son rythme et l'on est plongé dans un tourbillon de quiproquos qui nous font rire du début à la fin. C'est l'escalade des gaffes. Car plus ça avance, plus c'est gros. Et plus c'est gros, mieux ça passe ! Ce rythme endiablé laisse le spectateur pantois et étonné : quoi, c'est déjà fini ? On en voudrait encore. 

Mention spéciale à Sébastien Castro, qui campe un délicieux idiot, complétement dépassé par les événements mais finalement plein d'idées pour améliorer, croit-il, la situation. Jusqu'à l'inextricable. J'ai aussi beaucoup aimé les apparitions du room service, Rudy Milstein, parfaites de fausse naïveté et de curiosité. 

Un bon vaudeville, bien mené, dans un décor très chouette (ce qui ne gâche rien) et qui vous dérouille les zygomatiques du début à la fin ! 

mercredi 15 mars 2017

Le monde sans sommeil / La tour de Babel

Avec Miss Alfie, on a eu envie de dégainer notre Zweig ensemble. Il faut dire qu'elle a bien débroussaillé les œuvres complètes de notre viennois préféré l'an dernier, lors du challenge classique. Pour cette lecture commune, nous avons choisi deux textes : Le monde sans sommeil et La tour de Babel. 

Dirk Bouts, L'ascension des élus, 1450

Le monde sans sommeil

Zweig nous offre une réflexion poétique sur la longueur des nuits et l'inquiétude des hommes en temps de guerre. Ce n'est plus le sommeil qui peuple les nuits mais les rêves, les prières et les pensées pour les êtres chers, lointains, dont on ne sait peut-être plus rien. Tout semble transfiguré par la guerre ; plus fort, plus intense. Mais l'horizon que devine Zweig, c'est à nouveau le sommeil de la paix. Un texte poétique et puissant.

La tour de Babel

Voilà un article sur le pacifisme ou comment, sous des airs de conte biblique, Zweig rappelle aux intellectuels qu'ils peuvent, qu'ils doivent construire une grande œuvre commune. Cette œuvre, c'est l'Europe d'avant la Grande Guerre, une Europe des artistes, des liens malgré les frontières, de l'émulation intellectuelle. Et cette guerre, n'est-elle pas un nouveau châtiment divin d'un Dieu qui prend peur des avancées des hommes ? Zweig espère une paix prochaine, qui permettra de nouveau la construction commune de cette tour qu'aujourd'hui chacun tente d'édifier dans son coin. 
Je crois que c'est le texte que j'ai préféré de tous les essais lus aujourd'hui. Il est à la fois d'inspiration biblique et contemporaine, d'une langue belle et poétique. On est presque dans une nouvelle plus que dans un essai. Et cela a bien plus de force que tous les appels au nationalisme des textes suivants !

Et puis, bien sûr, j'ai eu envie de lire un peu plus. Et j'ai poursuivi dans cette veine avec les essais suivants : Parole d'Allemagne et Aux amis de l'étranger.

Parole d'Allemagne

Voilà un texte très étonnant car très pro-allemand. Autriche et Allemagne sont un seul pays et comme un seul peuple pour Zweig. L'Allemagne y apparait comme un homme fort, qui devrait lutter sur tous les fronts contre l'ennemi et dont la botte secrète résiderait dans son organisation et sa discipline. Oui, c'est un peu caricatural... et ce texte n'a pas la finesse que l'on connaissait habituellement à Stefan !

Aux amis de l'étranger

Même étonnement avec cet article qu'avec le précédent car il montre un Zweig nationaliste, pour lequel les siens comptent plus que ses amis de l'étranger. C'est donc un adieu, un peu pathétique, à tous les échanges, toutes les rencontres et les collaborations intellectuelles au-delà des frontières. L'auteur se sent submergé par son devoir de n'être qu'allemand, de se couper des autres. Il invite au silence à l'heure où les soldats agissent, il veut éviter les éclats de haine mais il marche sur le fil avec ce texte qui est tout sauf un silence...

Si les deux textes cités plus haut rappellent furieusement les échanges avec Romain Rolland et Le monde d'hier, les deux derniers surprennent par la véhémence de Zweig. On le croyait pacifiste mais il a aussi été embarqué par la fièvre nationaliste des premiers temps de la guerre, on l'imaginait européen alors qu'il était pro-allemand. Une posture qui ne dure pas mais qui questionne. Car c'est quelque chose qu'il omet complétement dans Le monde d'hier. C'est intéressant de voir qu'il ne reste pas campé sur ses positions, qu'il grandit, accompagné par d'autres intellectuels et amis. Et que sa vision de l'Europe fait plutôt rêver, contrairement à aujourd'hui. Est-ce la réalisation qui est en deçà des espérances ? Est-ce l'approche économique plutôt que culturelle qui est à mettre en cause ? Je n'ai pas de réponse mais j'ai l'impression qu'il faudrait remettre un peu de rêve et de mythe dans notre Europe.


vendredi 10 mars 2017

Aquarium

Seamstress, mistress, distress, stress par Louise BourgeoisCes Nouvelles de la Mongolie d'aujourd'hui de Luvsandorj Ulziitugs m'ont été offertes par les éditions Borealia que je remercie vivement !

J'ai beaucoup apprécié le style de cette auteur, qui dans certaines de ses nouvelles, joue avec l'absurde et le fantastique dans la vie quotidienne. Dans d'autres, il s'agit presque de petits essais, façon tranche de vie et tranche de soi. C'est un univers très frais, très féminin, intrigant et envoutant, parfois cruel, à la frontière entre rêve et souvenir, dans lequel il m'a plu me promener.Un univers qui peut faire penser à Ogawa par son onirisme, son côté très poétique mais aussi très dur.

Les nouvelles du recueil sont les suivantes:

Aquarium. 

Une mère devenue poisson observe sa famille depuis son aquarium. Une réflexion à la manière de Kafka sur le prisme que chacun jette sur le monde, la bulle dans laquelle on évolue.

Les images restées sur les lunettes. 

La vie d'Amuu à travers ses lunettes !

La limite du visible. 

Sur la mort du père et comment on devient un ciel (oui, c'est mystérieux mais c'est surtout très poétique).

La peur. 

Tout ce qui fait peur à la narratrice, dans la vie urbaine notamment.

Le miroir.

"Objet inutile qui embrouillait les gens" selon le grand-père, le miroir est évoqué à travers des anecdotes qui mettent en scène diverses femmes, de la petite fille à l'aïeule. Et s'il montrait notre âme ? Et si les poèmes de l'auteur étaient des miroirs de son être ? De la nouvelle à la considération poétique.

Une femme. 

Elles font toutes la queue. Elles attendent dans un hôpital... Vous allez bientôt savoir pourquoi.

Le vrai plaisir ou mon choix naturel. 

A partir de la question d'une journaliste sur le plaisir, l'auteur s'interroge sur ce qu'il représente pour elle, où il s'incarne ou se dissimule.

Une odeur si chaleureuse. 

Parcours et rencontre à travers les odeurs des êtres.

Voleuse. 

Un objet, puis un autre, puis encore un autre, disparaissent de sa maison. Jusqu'où cela peut-il continuer ?

Divine consolation. 

Histoire de femmes et de consolatrices.

Elle et Lui. 

Histoire d'une rencontre et d'une maladie, dans l'univers froid des conférences internationales. Histoire de codes culturels et d'incompréhensions.

Grossesse. 

Que lui est-il arrivé ? A-t-elle été violée ? A-t-elle trompée son mari ? Histoire d'un couple qui ne pouvait pas avoir d'enfant.

Mob grand-père non croyant. 

Souvenirs d'un grand-père, au caractère bien trempé. 

"Être pauvre est parfois la meilleure défense, ma fille ! Tes enfants ne pourront compter sur aucun objet, ils n'auront plus la possibilité de se dire qu'ils pourront les vendre ou les échanger contre quelque chose en cas de besoin. Que dans le futur ils aient foi en leur capacités et en leur travail ! Ce n'est pas un mal que de ne pas posséder d'objet. Au contraire, c'est en devenant des adorateurs d'objets qu'ils seront malheureux toute leur vie !"
"Personne n'a l'intention de se refuser une vie de grand luxe ou au moins une vie d'aisance. En fait, cela ne leur viendrait même pas à l'idée. Je peux comprendre qu'il ne soit pas donné à tout le monde d'avoir le courage de refuser une vie de luxe qui arrive sans qu'on l'ait cherchée [...]Mais voir des gens qui se démènent comme des ânes jusqu'à la fin, pour obtenir des choses qui dépassent leurs besoins, me trouver face à cette tendance à la compétition pour des choses ridicules, à cette attitude qui relève une incapacité évidente à penser aux autres, tout cela me met mal à l'aise".
 Cela peut paraitre accessoire mais j'ai aimé les ombres chinoises qui illustrent les nouvelles ainsi que la présentation détaillée de l'auteur. Un joli livre !

mercredi 8 mars 2017

La source

J'attendais avec impatience la lecture de ce roman d'Anne-Marie Garat. Et j'ai eu peur en lisant les premières pages... Je n'accrochais pas au style ! Heureusement, avec un peu de persévérance, j'ai réussi à entrer dans le livre.
 
Nous sommes dans la campagne française, au début du XXe siècle. Lottie vit auprès de sa mère et travaille comme couturière. Sous ses airs lourds, c'est une fille curieuse et maligne. Repérant un étranger se dirigeant vers Les Ardennes, elle le suit et découvre un secret de famille. Sa capacité à en prendre soin la fait embaucher directement aux Ardennes où elle passera sa vie. Après cette longue introduction, nous rencontrons la narratrice, chercheuse et prof, qui souhaite venir explorer les archives locales avec ses étudiants. Une impression étrange l'accompagne. Pourquoi son père s'est il précisément arrêté là il y a des années ? Que vient-elle chercher ?
Les deux personnages, Lottie et la narratrice, vont cohabiter, échanger au coin du feu quelques secrets et guider le lecteur dans une histoire familiale complexe et une histoire locale française avec ses héros et ses traîtres, ses archives oubliées ou glorieuses.
 
J'ai aimé l'intrigue que Lottie nous découvre petit à petit, sans jamais nous livrer la vérité ou jouant sans cesse avec elle. Elle nous le dit, c'est une histoire, à chacun d'y trouver ce qui lui convient. 

 "Je sondais les puissances du mensonge, ou plutôt de nos facultés de tordre à notre convenance les faits et les caractères, d'entendre ou de ne voir que ce qu'il nous plaît, de travestir les événements ou de les dénaturer au point de nous abuser nous-mêmes, si convaincus de notre bonne foi qu'ils nous semblent sincèrement vrais, mieux que la réalité ; mais qu'est-ce que la réalité pour nos sens ou sentiments ?"

J'ai moins aimé la narratrice, que j'ai trouvé un peu gauche. J'adore la façon dont Garat conte les histoires, avec la grande histoire dans le dos, comme on fouille dans de vieux albums. Sans être aussi épatant que Dans la main du diable, dont il est parfois très/trop proche, c'est une belle littérature française, avec un style étonnant, très travaillé, auquel il m'a fallu m'habituer pour apprécier réellement le roman. 
Source San Ignacio Paraguay

lundi 6 mars 2017

Sarah

Salar Uyuni

C'est ma première rencontre avec Marek Halter et avec sa série La Bible au féminin. Et je dois dire que je ne suis pas trop trop déçue, peut-être parce que je n'attendais rien de spécial. J'ai souvent peur des romans historiques, leur préférant les essais. Peur des approximations, des romances trop développées (Christian Jacq, héros de mon adolescence...), des anachronismes. Bref, peur du genre en lui-même.

On rencontre Saraï, fille d'un puissant d'Ur, le jour de ses premières règles. La voilà donc prête à épouser un noble de la ville et à lui donner des enfants. Mais notre adolescente est rebelle. Elle fuit en plein milieu de la cérémonie, laissant son père et son futur époux rouges de honte. C'est au cours de cette escapade qu'elle rencontre Abram, un nomade. Reprise par les soldats, Saraï prend sa décision : Elle sera l'épouse d'Abram ou de personne. Et d'ingurgiter des plantes qui la laissent stérile, après des jours entre vie et mort. Son destin est scellé, elle devient prêtresse d'Ishtar. Mais vous connaissez la Bible comme moi, Saraï va devenir l'épouse d'Abram et tarder à lui donner un fils. L'auteur imagine une malédiction, Saraï est condamnée à être la plus belle, à ne pas vieillir, à attirer les regards mais à ne pouvoir donner la vie. Et c'est le leitmotiv du livre, cette stérilité. 

Si Marek Halter intègre les épisodes bibliques bien connus de la Genèse, ceux-ci passent toujours au second plan pour ne pas quitter Saraï un instant. C'est à travers son regard, ses croyances (bien peu affirmées ou creusées, d'un relativisme presque contemporain) et son nombril (isme) que l'on traverse les événements. Si le roman se lit bien et que l'idée de faire parler les femmes de la Bible était intéressant, Sarah n'a pas non plus un intérêt fou. On sent que le sujet pouvait être plus creusé, plus challengé pour ne pas tomber dans une biographie fictive tournant uniquement autour de problèmes féminins, personnels, qu'il y avait des enjeux de foi, de politique, de représentations qui ont été écartés. Dommage.

vendredi 3 mars 2017

Les Pépites

Voilà un film que tout les cinéma auraient dû diffuser tellement il fait de bien. Voilà qui donne foi en l'homme bien plus que n'importe quel La La Land. Voilà qui fait changer le monde et ses règles.

L'histoire est celle de Marie France et Christian des Palières, qui se sont investis pour des asso à leur retraite. Installés à Phnom Penh, ils ont rencontré les chiffonniers. Voir des enfants fouiller dans les détritus pour manger et aider leur famille, les voir marcher pieds nus dans les ordures et respirer tous les jours des mouches a ému le couple. Il a commencé par installer une paillote pour donner du riz à ces enfants. Puis les a questionné sur leurs besoins. Ils étaient simples : aller à l'école et prendre un repas par jour. Et c'est ainsi qu'est né Pour un Sourire d'Enfant. Un projet d'école où les plus pauvres pourraient sortir de la misère. Il a fallu inventer des solutions avec les familles qui perdaient ainsi des sources de revenu, leur donner de l'argent ou du riz, éduquer les enfants et les parents, sortir des enfants de leur famille si besoin (prostitution et maltraitance). Bref, proposer à chacun un lieu qui lui permette de vivre dignement. Redonner une chance et des soins à chacun, dans un lieu où l'on se soucie de l'autre.

À partir des témoignages des enfants qui ont grandi dans cette école, des images d'archive de la famille des Palières et de l'association, des interviews des fondateurs, le spectateur découvre une formidable aventure humaine et sociale. Et s'émerveille de voir que c'est l'école de ciné du centre qui a fait le film ! Quelle réussite !
S'il y a un film à ne pas manquer pour gagner en optimisme, c'est celui-là !

Les pépites film
D.R.

jeudi 2 mars 2017

Un roman russe

Avec un jour de retard, voici ma copie pour le blogoclub ! Le sujet était Emmanuel Carrère et dans ma PAL, on trouvait Un roman russe.

Le plot : Notre narrateur est à la recherche de ses racines russes. Géorgiennes pour être précise. Il veut comprendre son grand-père, un homme qui a disparu en 1944. Autour de cet objectif initial, viennent s'agréger des prétextes pour mieux connaitre la Russie. Comme aller à Kotelnitch, un trifouilli les oies russe, où un hongrois est resté prisonnier de guerre pendant 50 ans. Et ce bled déprimant devient un incontournable de son histoire personnelle. Un lieu suffisamment intéressant pour y retourner, pour y faire un film en plus du reportage alors qu'il n'apporte qu'ennui et morosité. Et en parallèle de cette histoire russe, il y a une histoire d'amour et de sexe avec Sophie. Et une nouvelle publiée dans Le Monde, destinée à Sophie, mise en abyme dans le roman et qui fait du remplissage. Mais au fond, l'unique chose qui intéresse notre narrateur, c'est lui. Le monde tourne autour de ses rêves érotiques, de ses souvenirs d'enfance, de ses relations avec Sophie, avec ses amis, avec sa mère (s'il y a pas de l’œdipe là-dedans ?!). C'est un petit garçon capricieux, qui devient méchant quand tout ne tourne pas autour de lui. Eh oui, Sophie ne lira jamais sa nouvelle et c'est certainement cela, bien plus que toutes les trahisons, qui lui laissera à notre narrateur un goût amer.

Je sors de ce roman assez déçue. J'ai l'impression que ce n'est pas un livre offert à un lecteur mais simplement une thérapie pour l'auteur. Je me sens étouffée par tant d'égoïsme et de manipulation, par tant de violence et de sexe. Je trouve ça malsain et sans intérêt. Je crois que l'auto-fiction n'est vraiment pas pour moi !

Bronzino, Venus et Cupidon