Enthousiasmée par le talent de Peter Ackroyd que j'ai découvert avec La chute de Troie, je n'ai pas pu résister à ce titre en bibliothèque.
Nous sommes en 3700 à Londres. Platon est un orateur. Son sujet de prédilection ? L'ère de Godiche (1500-2300). Elle vient après l'ère d'Orphée (de -3500 à -300), époque de nymphes, de dieux et de créatures tricéphales et l'ère des Apôtres (de -300 à 1500), période de martyres et de prière. Lui succède l'ère des Lumières (2300-3400) et l'ère présente.
Contrairement à Socrate à qui fait penser ce roman, ne serait-ce que par sa structure (harangues, procès pour corruption de la jeunesse et mensonges, jugement), Platon ne joue pas avec la maïeutique. Cet homme affirme et juge. Enfin, dans un premier temps... Il procède en archéologue et historien : à partir des éléments conservés de l'ère de Godiche, il cherche à comprendre cette époque. Ainsi, il parle De l'origine des espèces au moyen de la sélection naturelle dont il attribue la paternité à Dickens (!). Le livre comporte en effet sur sa couverture Charles D., c'est donc évidemment Dickens (pour les incultes, c'est Darwin). Et comme il fait de ce livre un roman plutôt qu'un essai, cela devient une parodie de l'ère de Godiche à la manière d'un Don Quichotte. Ou comment à partir de connaissances partielles réécrire l'histoire et y transférer ses propres convictions et des éléments de compréhension déformés par le prisme de sa propre culture. Ainsi, Platon propose un glossaire de l'ère de Godiche. Parmi les définitions, notons celle de la "Course contre la montre : occupation d'une cohorte sans cesse renouvelée d'athlètes qui parcouraient continuellement la terre afin de vérifier le rythme des activités humaines et intervenir en cas de relâchement. Il semble que les Godichiens aient aimé la vitesse pour l'amour de la vitesse et pratiqué l'efficacité pour l'amour de l'efficacité. Ils craignaient perpétuellement que le monde ne perde sa vélocité, voire qu'il ne s'immobilise complètement".
Comme Socrate, Platon a son daimon, avec lequel il dialogue, son âme. Et d'orateur péremptoire, il devient sceptique. Il met en question ses convictions. En explorant plus spécifiquement l'ère de Godiche, il utilise lui aussi le mythe de la caverne comme élément de compréhension de l'époque et des comportements humains. Mais le doute et la remise en question ne sont pas bien acceptés par la cité...
Roman parodique et conte philosophique, ce récit est un pamphlet bourré d'humour contre notre société. En prennent également pour leur grade les historiens, les archéologues, les linguistes, bref, tous les chercheurs en sciences humaines qui oublient parfois de se questionner et assènent leurs vérités sans prendre de recul. Fourmillant de références, de critiques et de mots d'esprits dans lesquels on s'amuse à retrouver les traits de notre civilisation, reflétés dans un miroir déformant.
Efficace et drôle, ce roman est une petite pépite !
Figure toi que je l'ai lu et avais bien envie de le relire (j'aime Ackroyd depuis sa bio de dickens, un monstre de bouquin génial)
RépondreSupprimerAckroyd est effectivement topissime ! J'ajoute la bio de Dickens à ma LAL.
SupprimerEfficace et drôle, tu me tentes.
RépondreSupprimerChic !
SupprimerJe suis davantage tentée par la chute de Troie mais je note celui-là, car c'est ma nouvelle tocade, la période antique...
RépondreSupprimerAttention, il n'est pas sur la période antique mais s'en inspire !
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