Grâce à Eliza, j'ai pu relire, coachée, ce classique de Tolstoï que j'avais dévoré voilà plus de dix ans. Pas sûre d'avoir eu le courage sans cela... Merci ! Une relecture, c'est un moment de retrouvailles avec une oeuvre et un auteur qu'on a aimé. Tous les détails ne sont plus forcément clairs dans l'esprit du lecteur mais il n'a pas non plus d'énormes surprises. Par contre, il ressent encore plus d'empathie avec les personnages. Heureux de les retrouver, il n'aime pas les perdre à nouveau. Encore une fois, j'ai beaucoup apprécié le personnage de Pierre, cet homme à qui la vie sourit mais qui n'arrive pas à se satisfaire de ce qu'il a. Ce personnage gentil, influençable mais toujours en quête de perfectibilité. Il y a en lui, comme le souligne Romanza, un peu de Lévine, d'Anna Karénine. Natacha, que j'avais adorée ado, m'a laissée plus critique. Elle est belle, elle est joyeuse, elle est irresponsable. C'est une enfant qui grandit et mûrit devant nous mais garde toujours un côté lunatique. Elle m'a plus agacée et déçue que la première fois.
J'imagine que vous connaissez tous le plot, non ?
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De l'autre, il y a les intrigues des aristocrates de Moscou et de Saint-Petersbourg. On rencontre d'abord deux jeunes gens, André Bolkonsky et Pierre Bezoukhov, qui nous introduisent à toute la bonne société. Les Kouragine notamment. Puis les Rostov. Je ne rentrerai pas dans les détails des aventures des divers personnages, les histoires d'amour, d'ambition et de trahison. Sans parler de la place de la religion, de l'argent, de la franc-maçonnerie, des rapports entre aristocratie et serfs... Bref, Tolstoï nous plonge dans la société de l'époque et nous en montre beaucoup d'aspects. On se passionne pour la vie de ces hommes et pour leurs bassesses. Car si chacun (ou presque) pris séparément est plutôt bon et bienveillant naturellement, les rapports avec les autres viennent éprouver et noircir cette bonté initiale.
Si j'ai relu l'ensemble avec grand plaisir, je me suis aperçue que j'avais complètement oublié les nombreuses considérations historiques de Tolstoï. La Guerre et la paix n'est pas uniquement un roman dans la plus pure tradition du XIXe siècle, c'est aussi une analyse voire un essai historique. Ainsi, la deuxième partie de l'épilogue est entièrement dédiée à l'histoire telle qu'elle est écrite par les historiens, qui cherchent les causes et les effets, qui créent des liens et font des déductions. Pour l'auteur, rien n'est plus trompeur que l'impression de liberté individuelle des hommes. C'est la prédestination qui le guide. Et de comparer l'histoire aux autres sciences comme l'astronomie : "Pour l'astronomie, la difficulté de la reconnaissance du mouvement de la terre consistait dans ce fait qu'il fallait renoncer au sentiment spontané de l'immobilité de la terre et au sentiment du mouvement des planètes ; de même pour l'histoire, la difficulté de la reconnaissance de la soumission de la personne aux lois de l'espace, du temps et de la cause consiste à renoncer au sentiment spontanée de l'indépendance de la personne". Et finalement, tout le roman s'éclaire suite à cette démonstration finale. C'est là que Tolstoï souhaitait amener le lecteur et tous les indices disséminés dans les tomes précédents servaient cette vision fataliste.
Je pourrais aussi vous parler du style fluide de Tolstoï, tout en précision et en simplicité, qui n'empêche certes pas les répétitions. De sa plume habile à nous camper les scènes de combat comme une soirée de bal. De ses considérations transmises par ses personnages ou par ses propres analyses, récurrentes. Mais je préfère vous laisser découvrir tout cela en lisant vous-même ce merveilleux roman russe !
Celui-ci, je l'ai abandonné en cours de lecture. ET pourtant j'avais aimé "Anna Karénine".
RépondreSupprimerPourquoi l'as-tu laché ? Qu'est-ce qui ne t'a pas plu ?
SupprimerUn grand coup de coeur pour moi! Et oui, il y a un côté essai très important là-dedans.
RépondreSupprimerTout à fait. Et ce n'est pas si gênant que je l'imaginais.
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