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lundi 14 novembre 2022

Un instant dans le vent

Sortie de PAL pour ce roman d'André Brink, un auteur dont je ne connaissais pas l'existence et qui s'est engagé contre l'apartheid. 

Dans ce roman, on suit le périple d'Adam et Elisabeth. Elisabeth, jeune femme du Cap, blanche, suit son mari, Erik Larson dans son expédition scientifique. Il part herboriser et empailler des animaux qu'il affuble de noms latins avant de les envoyer en Europe. Hélas, l'expédition ne fait pas long feu et Elisabeth reste seule au milieu de la savane. C'est sans compter sur Adam, un esclave enfui, qui suit le convoi de loin en loin et décide de rejoindre la jeune femme. Ils vont devoir faire équipe pour regagner le Cap, apprendre à se connaitre, à s'apprécier...

Une histoire d'amour et de trahison, une histoire où les mots souvent se mélangent à mesure que les personnages avancent dans leurs épreuves. Un peu longuet et planant parfois, malheureusement. Et puis, les quelques informations sur le fait divers qui a inspiré le roman donne pas mal de clés à qui le lit attentivement.


jeudi 27 janvier 2022

La plus secrète mémoire des hommes

Aussitôt reçu, aussitôt lu, ce livre de Mohamed Mbougar Sarr n'a pas fait long feu. Il faut dire qu'il s'agit d'une quête, d'une enquête, sur un livre, Le labyrinthe de l'inhumain, et son auteur, T.C. Elimane. Quête littéraire d'un jeune écrivain, elle nous entraine du Sénégal en France, aux Pays-Bas puis jusqu'en Argentine.

Ce livre mythique, c'est d'abord un titre dans un manuel, lié à un écrivain maudit, plagiaire, dont toute trace a disparu. Et puis, c'est le hasard ou le destin de la rencontre entre le livre et notre narrateur, Diégane, un jeune écrivain et thésard, suite à une nuit avec Siga D., écrivaine scandaleuse. 

Lecture du livre, relecture, choc, partage du bouquin dans les cercles de copains écrivains, recherche des traces (articles et critiques), rendez-vous avec Siga D. pour tenter de comprendre le livre ou l'auteur. En savoir plus en tous cas. 

Les formes se mêlent : mémoires, interview, liste, emails... la langue reste précieuse (Diégane, notre héros, thésard, enquêteur et écrivain) ou crue (Siga D.). Elimane se découvre par petites touches, quand il veut bien se laisser voir. Diégane absorbe toutes les infos de Siga D., pompe son enquête, persévère et se rend jusqu'au Sénégal, tandis que d'importantes manifestations se préparent, pour retrouver le village natal du mystérieux écrivain.

Il faut aimer les labyrinthe et les mises en abime, les mots inusités et les jeux littéraires pour s'amuser avec ce livre. S'amuser de se perdre un peu, parfois, entre les voix multiples, entre les pères d'Elimane, entre ses amis égarés dans la Seconde Guerre mondiale, entre les rites de marabout, les vivants et les morts. Suivre les voies de traverse d'une femme qui hait et détruit, qui aime et avance. Suivre les méandres d'un jeune homme qui se forme et ne veut pas vraiment faire de choix. Suivre le court d'une histoire qui fait des virages, qui se moque des chronologies. Une lecture qui fait aimer les livres !



lundi 23 août 2021

Puissions-nous vivre longtemps

C'est une collègue qui m'a prêté ce roman d'Imbolo Mbue : une lecture intéressante par sa thématique mais une écriture pas incroyable. 

A Kosawa, des enfants toussent et meurent. Régulièrement, trois hommes de la compagnie Pexton viennent parler aux villageois. Car l'installation de puits de pétrole à proximité du village, les fuites et les réparations hâtives ont certainement pollué terres et rivières de Kosawa. Sans parler des fumées qui ont changé la couleur du ciel. On palabre, mais rien ne se passe : une délégation de villageois a déjà disparu en allant réclamer à Pexton de s'intéresser à eux. Mais ce soir, c'est différent. Konga, l'idiot du village, propose de kidnapper les hommes jusqu'à ce que leurs voix soient entendues. C'est le début d'un drôle d'engrenage entre réclamations et contreparties, entre guerre d'usure et violences.

Au centre de ce roman, Thula, une jeune femme qui partira étudier aux Etats-Unis, sa mère, sa grand mère, son oncle et son frère. Une famille qui tente de s'en sortir après que Malabo, le père de famille, a disparu en allant voir Pexton à Bézam, la grande ville voisine. Et les voix des enfants continuent de conter l'histoire du village, sur 40 ans de combats.

Si la thématique du colonialisme, de l'exploitation des ressources, de la corruption des dirigeants et des souffrances des plus faibles est intéressante à faire connaître, il manque toutefois à ce roman une voix plus forte. L'uniformité de ton des personnages, les longueurs, l'évolution finalement assez attendue de chacun rend ce roman un peu lourd, s'embourbant dans les interminables procès et actions sans effets. 



lundi 5 octobre 2020

Contes initiatiques peuls

Je suis tombée sur ce livre d'Amadou Hampâté Bâ dans les bureaux du boulot. Vous savez combien j'aime les contes et j'avoue que ma connaissance des contes africains est très faible. Deux bonnes raisons pour le lire !

L'ouvrage contient deux contes : Njeddo Dewal, mère de calamité et Kaïdara. Ce sont des contes initiatiques pour leurs personnages mais aussi pour celui qui écoute. En effet, ces aventures sont pleines de symboles qui visent à initier spirituellement les hommes. Heureusement, les notes sont abondantes, ainsi que la postface et la préface pour décoder ces significations. L'auteur le dit : 
"Ce sont les êtres mêmes de la nature qui fournissent les symboles de leur enseignement, et le monde environnant devient comme un grand livre qu'il faut apprendre à déchiffrer"
"Pour nous, tout est école... Rien n'est simplement récréatif. (...) Que ce soit par contes, par chants, par parole, rien, en Afrique, n'est vraiment une distraction simple. Je peux dire ainsi que le profane n'existe pas en Afrique. Dans la vieille Afrique, il n'y a pas de profane : tout est religieux, tout a un but, tout a un motif"
Je résumerai bien mal chacun des contes mais en voilà les tenants et aboutissants. Je ne peux que vous conseiller de les lire pour en goûter toute la saveur. 

Njeddo Dewal, mère de calamité : être monstrueux et maléfique, créé pour punir les Peuls de leur orgueil, Njeddo Dewal est magicienne. Elle prend les atours du beau, notamment à travers ses 7 filles, pour perdre les hommes. A la femme de Bâ-Wâm'ndé, un songe est envoyé qui donne les clés pour éliminer Njeddo Dewal. Mais cela va demander à Bâ-Wâm'ndé d'affaiblir la magicienne à travers une aventure improbable, où il sera aidé par une reine scorpion, un être difforme, un mouton et plein d'animaux auxquels il avait pu rendre service auparavant. Et ce n'est que son petit-fils, le taurillon blanc, qui pourra mettre fin au règne de Njeddo Dewal avec ses oncles.

 Kaïdara est l'histoire de trois hommes partis en voyage au pays des nains, un pays caché, où toutes les rencontres sont symboliques. Il n'empêche qu'il y a des défis à y relever, par la persévérance, la force, la patience... Nos trois hommes sont confrontés à des phénomènes qu'ils ne comprennent pas avant de rencontrer Kaïdara, le dieu. Ils en reçoivent des dons. Mais comment les utiliseront-ils ? C'est celui qui cherchera la sagesse qui en sortira vivant !


jeudi 16 juillet 2020

Matin de roses

Départ immédiat pour l'Egypte avec ces trois nouvelles de Naguib Mahfouz, dans des quartiers du Caire qui ont changé. C'est plein de mélancolie et de photos sépias, d'histoires de voisinages et de voisins. A vrai dire, tout est empreint de nostalgie, peut-être trop pour moi !


Oumm Ahmad
Oumm Ahmad est une figure du quartier d'Al-Abbasseyya. Cette femme vive et forte connait toutes les histoires du quartier : marieuse, spécialiste des affaires conjugales, elle entre dans toutes les maisons, surtout celles des notables. Et en raconte les secrets. 
"Si je fais appel à mes souvenirs, je ne trouve que des images éparses qui ne veulent rien dire. Une belle qui se montre à une haute fenêtre, trois autres qui débouchent ensemble d'une voûte, une calèche qui se balance sur la place tel un palanquin sous le poids d'une femme. Ne reste de la vie foisonnante d'antan dans le vieux quartier que les souvenirs d'enfance : des paysages flous, des voix qui ne sont plus, une tendresse infinie et un cœur qui bat chaque fois que viennent le remuer les parfums des souvenirs." 
"Nous errâmes ensemble dans un monde peuplé de morts. Combien de gens étaient partis ! C'était comme si les visages n'avaient jamais resplendi de tout leur éclat, comme si les gorges n'avaient jamais vibré de rires. Voilà la conteuse d'histoires, le médecin de l'amour, du sexe et du bonheur, allongée sur un vieux lit, et devenue un fardeau quotidien pour la personne la plus proche à son coeur. Que valent les histoires, Oumm Ahmad, puisqu'elles ne font que se répéter, d'une manière ou d'une autre ?"
Matin de roses
On fait le tour des familles de la rue Al-Radwân, dans le quartier d'Al-Abbasseyya, entre le vieux quartier aux petites rues et le nouveau quartier. Pour chaque famille, on découvre une position sociale, des histoires de mariage et d'ambitions.

Dieu bénisse ta soirée
Un jeune retraité fait le triste bilan de sa vie. Il est désespéré de solitude. Et pourtant, il avait rencontré des jeunes femmes. Au soir de sa vie, une nouvelle histoire est-elle possible ?


lundi 26 août 2019

Un long chemin vers la liberté

Nelson Mandela est un homme que j'admire et ça faisait longtemps que je souhaitais lire son autobiographie. C'est désormais chose faite, même si n'a pas été sans mal. A vrai dire, j'ai trouvé ça long. Mais édifiant !

Cette autobiographie retrace le parcours de Mandela, depuis son enfance jusqu'à son élection comme président en 1994. Né à la campagne, éduqué pour devenir conseiller royal, il fuit un mariage arrangé pour poursuivre des études de droit à Johannesburg où il travaille pour devenir avocat. Il s'engage bientôt dans le Congrès national africain (ANC) pour soutenir les droits des africains - et des métis - et réclamer le droit de vote. C'est, je crois, la partie que j'ai trouvée un peu longue : les manifestations, les déplacements, la création de la charte pour la liberté et les arrestations. On est encore dans la non-violence jusqu'aux années 60 où Mandela part se former pour mener des actions de sabotage et introduire la lutte armée par l'ANC. Puis c'est l'arrestation, le procès de Rivonia et l’incarcération à Robben Island. Là, tu t'inquiètes du nombre de pages qu'il reste. Et en fait, il se passe plein de choses en prison. Le racisme y sévit autant qu'à l'extérieur, les sujets de lutte sont toujours là. Et Mandela ne renonce pas. C'est dingue cette force, cette persévérance ! C'est d'ailleurs là qu'il commence cette autobiographie. Enfin, les dernières pages parlent des négociations, entamées sous la pression internationale, et menées avec tact et discrétion par Mandela et le gouvernement. C'est un jeu de finesse pour parvenir à faire tomber l’apartheid. On ne saura pas comment se vit l’accession au pouvoir et le démantèlement d'un système oppressif. 

Ecrit avec beaucoup de précision et de détails, notamment sur tout ce qui est politique, cette autobiographie fait surtout ressortir la puissance du personnage. On ne saura rien ou presque de sa vie personnelle, de ses sentiments, c'est très factuel et donc assez froid. Heureusement, quelques pages, dont les dernières, laissent transparaître l'homme et ses valeurs derrière ses actes et déclarations. Édifiant comme je le disais !

" J’ai toujours su qu’au plus profond du cœur de l’homme résidaient la miséricorde et la générosité. Personne ne naît haïssant une autre personne à cause de la couleur de sa peau, ou de son passé, ou de sa religion. Les gens doivent apprendre à haïr, et s’ils peuvent apprendre à haïr, on peut leur enseigner aussi à aimer, car l’amour naît plus naturellement dans le cœur de l’homme que son contraire. Même aux pires moments de la prison, quand mes camarades et moi étions à bout, j’ai toujours aperçu une lueur d’humanité chez un des gardiens, pendant une seconde peut-être, mais cela suffisait à me rassurer et à me permettre de continuer. La bonté de l’homme est une flamme qu’on peut cacher, mais qu’on ne peut jamais éteindre". 

lundi 15 octobre 2018

Le peuple des ombres. Itinéraire d'un enfant migrant

Depuis que le père de Kouame soutient la campagne de Gbagbo, sa mère est tendue. Et si ça tournait mal ? Et quand ça tourne mal, c'est violent. Kouame voit ses parents assassinés et sa soeur violée sous ses yeux. Il fuit. D'abord pas trop loin, ailleurs à Abidjan. Puis, il est à nouveau menacé et doit fuir plus loin. D'abord au Ghana, puis au Niger. Et son chemin se poursuit jusqu'en Libye. Avec des passages par des prisons, des conditions de transport inhumaines, un solitude ancrée au corps... Mais malgré tout, l'envie de vivre. Un peu d'espoir. Il poursuit son chemin jusqu'en France, traversant la Méditerranée en 2013.

L'histoire de ce voyage, de cette lutte et de cette fuite est contée avec des mots simples. Pas de fioritures ou de détails, c'est l'épopée au jour le jour d'un enfant qui fuit pour sauver sa vie. C'est touchant, c'est fort. Et en même temps, j'ai eu une impression de voyeurisme en lisant les horreurs traversées. Pourquoi ce besoin de savoir, de lire, d'observer les moments les plus durs de la vie d'un homme ? 


mercredi 18 avril 2018

La clef de Gaïa

C'est un peu par hasard que nous sommes tombés sur ce spectacle au théâtre des Mathurins. C'est un one woman show de Lina Lamara, accompagnée par Pierre Delaup à la guitare.

Entre histoires et chansons, notre actrice se dédouble, devenant Mouima, une grand-mère algérienne, ou Gaïa, la petite française. Et l'on voit Gaïa grandir, de petite fille à femme, et Mouima vieillir et raconter de plus en plus la vie d'avant. Histoire de cultures qui changent, de secrets qui se confient de femmes à femmes... C'est tendre, c'est parfois triste et violent (moment guerre d'Algérie qui vient assombrir le spectacle et ne s'y intègre qu'à moitié), mais dans l'ensemble c'est gai, poétique et chantant. Une jolie découverte !


mardi 20 janvier 2015

Le Maroc contemporain

Encore un peu de temps pour découvrir cette expo à l'Institut du Monde Arabe puisqu'elle est prolongée. Heureusement pour vous !

Cette expo nous fait découvrir la variété de la création contemporaine marocaine, dans les domaines de la photo, de la vidéo, de la peinture, des installations... et même de l'artisanat et de la mode. Organisée sur quatre étages, elle demande de prendre un peu de temps pour être appréciée. Surtout qu'elle a un côté très cosy avec ses salons... On y resterait bien toute la soirée !

Des premières salles, je retiendrai l'ironie des Ânes Situ de Hicham Benohoud, les abstractions colorées et toutes en courbes de Mohamed Melehi, les paysages scarifiés et légers de Yasmina Ziyat. J'ai été moins sensible à toute la section "Traduire" qui, malgré son titre, ne m'a pas trop parlé. 
Mais mon gros coup de cœur va surtout à l'oeuvre de Younès Rahmoun, Zahra Zoujaj. Seule dans cette installation poétique et esthétique, éclairée par ces 77 lampes de verre et bercée par un doux son, j'étais sous le charme des lumières dont l'intensité ne cesse de changer légèrement. Apaisement garanti ! 

Younès Rahmoun, Zahra Zoujaj
Younès Rahmoun, Zahra Zoujaj, D.R.

La partie sous-sol, parcourue plus rapidement, a moins retenu mon attention. Les questionnements sur les printemps arabes et la place de la femme dans la société sont pourtant des sujets qui m'intéressent. Mais je n'ai peut-être pas tout suivi... Quelques regards de femmes photographiées m'ont touchée et me resteront. 

Malgré ou grâce à son hétérogénéité, cette exposition donne à voir un art marocain bien vivant et protéiforme. Moi qui ne connaissais pas du tout l'actualité de sa création, je sors avec quelques œuvres qui m'ont interpellée, une attention plus forte à la place de la spiritualité dans l'art (merci Younès Rahmoun), à l'humour et à l'ironie de ces artistes. Laissez-vous mener par la fantaisie et la créativité de ce Maroc aux mille visages, c'est un joli voyage !

jeudi 6 novembre 2014

Le sel de la terre

Merci Aifelle pour ton joli billet sur ce film, qui nous a encouragé à le découvrir avant qu'il ne soit plus projeté. Ce documentaire présente la vie et l'oeuvre de Sebastiao Salgado, photographe, dont nous avons manqué la dernière rétrospective, Genesis, à la MEP.

Salgado, Sahel, 1984
S. Salgado, Sahel, l'homme en détresse, 1984
D.R.

Contrairement à ce que j'ai cru au premier abord, Salgado a passé la plus grande partie de sa carrière à faire des portraits. Originaire du Brésil, exilé en France pendant ses études, il a d'abord voyagé en Amérique du Sud, pour vivre avec des communautés reculées et nous livrer leurs portraits. On découvre avec envie un Salgado qui nous parle de tel village, où les gens ne se déplacent qu'en courant, telle autre ville incroyablement pieuse, ou encore telle autre où tout le monde est complètement saoul le week-end...

Salgado passe ensuite de nombreuses années dans le Sahel, où il est témoin de la famine, de la misère, de la mort omniprésente, mêlée à la vie. Et de la fuite de ces peuples affamés vers des terres plus accueillantes. Le migrant devient un de ses thèmes de prédilection. Il s'intéresse ensuite au travail manuel à travers le monde. Ces photos, rassemblées sous le titre La Main de l'homme, montrent aussi bien des chercheurs d'or grouillant dans les mines brésiliennes, les pêcheurs d'Asie jusqu'aux techniciens des usines les plus pointues. C'est aussi à cette période qu'il couvre les incendies des puits de pétrole du Koweit : une lutte titanesque entre le feu et l'homme, muni simplement de sa lance à eau ! Images d'Apocalypse impressionnantes ! 

S. Salgado, Koweit, 1991
S. Salgado, Koweit, 1991
D.R.

Ses projets le conduisent aussi au Rwanda dans les années 94 ; là, il est témoin du génocide qui est perpétré, et contribue directement à le faire connaitre aux yeux du monde. Les clichés, crus, défilent, montrant une horreur pas si différente de celle des "grandes guerres". Un passage très dur à regarder, qui marque également un tournant dans la vie de Sebastiao, qui dit alors perdre sa foi en l'être humain.

Ce globe trotter, écœuré, se réfugie alors dans la ferme familiale qu'il replante de forêts. Cette belle réussite lui donne envie de photographier la nature. Il part dans les zones les plus reculées du monde pour rencontrer des peuples aux traditions inchangées depuis des millénaires, des animaux en voie de disparition et une nature presque vierge de la main de l'homme. 

Ce documentaire de Wim Wenders propose à la fois de découvrir un artiste et son oeuvre, commentée par lui-même. En cela, c'est un très bel outil de compréhension d'une approche de la photographie : sociale, engagée mais aussi très esthétique. C'est peut-être ce qui est le plus dérangeant : les photos des sujets les plus douloureux (hommes morts de faim ou de maladie) restent fascinantes et belles. Quant à la dernière partie de son oeuvre, tournée vers la nature, elle est finalement décevante par rapport à ses sujets initiaux car beaucoup moins touchante mais toujours aussi puissante.

lundi 24 mars 2014

La mort du roi Tsongor

Et voilà, j'ai enfin lu ce livre qui était sur ma PAL depuis 11 ans. Il a encore son joli bandeau "Prix des libraires 2003 / Goncourt des lycéens". Merci à Shelbylee qui m'accompagne dans cette lecture. Sans elle, ce livre serait encore dans les limbes de la PAL. 

Afrique roi Tsongor

Tsongor pépare les noces de sa fille, Samilia, avec Kouame, roi des terres de sel. La veille du mariage, Sango Kerim demande Samilia comme épouse. Samilia lui a promis, enfant, d'être sa femme. Où qu'il regarde, le roi conquérant voit la guerre. Il est las. Il est âgé. Et c'est aujourd'hui le jour où il doit mourir. Il appelle Souba, son fils benjamin, et lui demande de lui construire des tombeaux. Aux autres, il ne dit rien. Commence alors une guerre effroyable entre Kouame et Sango Kerim. Une guerre sous les remparts de Massaba, un siège sans fin. Et Tsongor, errant parmi les ombres, voit sa famille se déchirer et ses enfants mourir l'un après l'autre.

Il y a dans ce texte de Laurent Gaudé une immense force épique et tragique. Ces terres d'Afrique font résonner un nouvel épisode des guerres mythologiques. Massaba devient Troie, Samilia, Hélène, Etéocle et Polynice s’entre-tuent à nouveau. On retrouve cette même puissance dans son roman Pour seul cortège. Sang et larmes, vanité, haine, un pays plonge dans la violence et la mort pour la possession d'une femme.
Suivant les enfants de Tsongor et les transformant en héros, l'auteur nous dévoile un peu de leur père, un peu d'eux, de leur pays et des dieux qui président à leur triste destinée. 

dimanche 16 février 2014

Dictionnaire amoureux des explorateurs

Je ne vous présente plus cette collection que j'affectionne chez Plon. Le nombre de références sur ce blog parle pour elle.


Cet opus de Michel Le Bris nous invite à rencontrer des explorateurs. Personnages historiques ou légendaires, terres inconnues ou imaginaires, peuplades surprenantes, il y a un peu de tout cela dans ce dictionnaire. J'ai pu suivre la course au pôle Nord par Peary et Cook ainsi que les expéditions de leurs prédécesseurs dans ce désert blanc. J'ai rencontré des illuminés comme lady Stanhope qui se prenait pour Zénobie. J'ai accompagné les Islandais, les bretons, les espagnols et beaucoup d'autres à la découverte des Amériques. J'ai rêvé aux ouvrages de Conan Doyle, Jack London ou Stevenson.

Bref, j'ai découvert beaucoup d'explorateurs (je ne suis pas très calée sur le sujet) et d'explorations, j'ai noté quelques titres de bouquins. J'aime beaucoup ce format qui permet de s'informer en quelques pages sur les grands noms d'un sujet précis. Et la subjectivité de ces choix, les liens entre l'auteur et le thème sont particulièrement forts et intéressants ici. On se rend compte que tous ces hommes ont façonné l'imaginaire de Le Bris. Et c'est ainsi qu'il nous donne le goût de le suivre. C'est enlevé, bien écrit... Par contre, même si je retiens les anecdotes, j'ai un peu de mal avec les noms de chacun. Il faudra que je compulse cet ouvrage régulièrement !

Un livre qui donne envie de partir à l'aventure !

mercredi 29 mai 2013

Pour quoi vivons-nous ?

Question existentielle s'il en est, dont l'écho résonne avec plus ou moins de force selon les périodes de la vie. Amis philosophes, lecteurs en questionnement ou curieux égarés, ce livre de Marc Augé ne vous donnera pas de réponse. Soyez-en conscients. Il ne vous donnera d'ailleurs que des pistes, façon terre battue plutôt que goudronnés et peu d'indications. Vous l'avez compris, je n'ai pas trouvé ce que j'espérais dans cet ouvrage. 

DR

L'intro était pourtant assez alléchante. Dressant le portrait d'une famille Dupont, empêtrée dans la routine et la consommation, l'auteur interroge sur le sens du bonheur et sur la relation aux autres. Puis, il dessine le chemin de ses recherches, depuis l'Afrique jusqu'à nos sociétés occidentales. 

Il étudie notamment la place des rites et des relations dans les sociétés africaines, s'attarde sur la place du rêve et des hiérarchies. Il interroge ensuite la mondialisation et la fin des grandes utopies qui laissent un vide. Quelles fins reste-t-il aux hommes, noyés dans une société de consommation qui se plait à faire des pourcentages et des sondages ? Vivant dans le présent, l'immédiateté, que reste-t-il au long terme ? Les religions en prennent pour leur grade ainsi que l'économie et la science. Mais elles constituent autant de pistes que l'anthropologue vise à suivre...

mardi 28 mai 2013

Cartes. Voyage parmi les curiosités et merveilles du monde

Tu crois que tu vas ouvrir un atlas tout bête ? Que ce livre d'Aleksandra Mizielinska et Daniel Mizielinski va te montrer les pays du monde en jolis dessins ? Eh bien tu te trompes ! Il y a bien plus que cela dans ce livre.

On parcourt les continents à mesure que l'on tourne les pages et l'on en découvre certains pays. Il y a des chiffres (superficie, nombre d'habitants) mais aussi les langues, les noms les plus communs, les personnages historiques, les beautés naturelles, les animaux, les plats typiques, les monuments et tout ce qui fait la spécificité d'un pays, d'une culture.


C'est un livre très riche, qu'on feuillette selon son intérêt, dans lequel on peut se plonger pour dix minutes ou deux heures. En effet, il déborde d'informations. A chacun d'y puiser. Et aux enfants d'interroger : qu'est ce que cet animal ? Pourquoi il y a une voiture en France ? ça se mange ce plat ? Oh, des montagnes, la mer, les baleines, les pingouins etc.
Bref, une vraie mine de trouvailles ! Et des illustrations sympa !

jeudi 4 avril 2013

Zoos humains. Au temps des exhibitions humaines

Connaissez-vous cette partie sombre de notre histoire ? 

Imaginez le jardin d'acclimatation à Paris, accueillant des peuples divers, enfermés et exhibés, répétants sans cesse danses et rites (réels ou recréés pour les besoins du show) de leurs pays. 
Ce livre collectif de Nicolas Bancel, Pascal Blanchard, Gilles Boetsch, Eric Deroo et Sandrine Lemaire rassemble de nombreux articles sur le sujet, depuis les freaks shows de Barnum jusqu'aux émissions de télé réalité.  

A travers l'analyse très précise de ces exhibitions (peuples choisis et imaginaire qu'ils véhiculent), dans tout le monde occidental (études de cas sur la Suisse, la France, la Belgique, la Grande-Bretagne, l'Espagne etc) se dessine l'image de l'autre dans nos sociétés. Sociétés coloniales sûres de leur supériorité. Exotisme divertissant. On se fait peur en famille en allant observer des cannibales (!). Le rôle des scientifiques dans la recherche d'une hiérarchie des races est également mis en question. Avec tous les débats que ça occasionne ensuite dans les restitutions des restes humains. Eh oui, cette histoire est encore très actuelle. Et c'est ce qu'analyse la dernière partie, sur le racisme actuel, sur les nouveaux zoos humains...

Un ensemble très riche, des articles divers et des regards de spécialistes, auxquels je ne rends pas vraiment justice, avec des recherches poussées, des mises en perspective et le désir de faire sortir cette histoire de l'oubli.
Sur ce sujet, le musée du quai Branly proposait une passionnante exposition.

dimanche 4 novembre 2012

Alger sans Mozart

Ce roman polyphonique de Canesi et Rahmani est une excellente surprise. Pour tout dire, il ne me tentait pas. Et puis j'ai lu de bonnes critiques. Et je suis désormais contente de l'avoir lu.



Ce roman, c'est surtout l'histoire de Louise. 
Sa famille vit en Algérie depuis plusieurs générations. Elle a 20 ans lorsque commence la guerre d'Algérie. 50 ans plus tard, c'est une femme broyée par l'histoire que l'on retrouve.

Car Louise, superbe jeune femme, est devenue une vieille grosse édentée, qui ne se nourrit que de cigarettes et d'alcool. Comment cette fille dynamique a pu tomber si bas ?
C'est après sa rencontre avec Sofiane, son jeune voisin, qu'elle commence à se raconter.
Et nous l'écoutons, depuis qu'une envoûtée a prédit son avenir et celui de sa soeur, jusqu'à ces jours de déchéance.
Nous rencontrons aussi Sofiane, le jeune algérien curieux de tout, Marc, le neveu homosexuel réalisateur paumé, et quelques autres satellites. 
Tragique histoire d'amour entre un homme, Kader, et une femme, Louise. Tragique histoire d'un pays schizophrène. Mais d'une éblouissante beauté. D'une puissante fascination.
Ce roman est beau, triste bien sûr. Il fait réfléchir sur l'histoire, sur les sociétés, sur la religion, sur la colonisation, évidemment, et peut-être aussi sur les relations humaines.
Une magnifique découverte, qui a parfois la puissance des tragédies antiques. 

dimanche 15 juillet 2012

L'Afrique fantôme

Voilà des années que ce livre était dans ma LAL. M. Leiris, que j'ai découvert avec L'Age d'homme, m'intriguait. Je me demandais ce qu'il pouvait bien raconter pendant ses presque deux ans de voyage en Afrique, de Dakar à Djibouti. Sans étonnement, M. Leiris parle beaucoup de lui (c'est un journal intime, ne l'oublions pas) et un peu de ce qu'il voit. On perd assez vite le côté carnet de voyage et la distance descriptive de l'ethnologue...

De 1931 à 1933, l'équipe de Griaule s'enfonce dans une Afrique de moins en moins civilisée. La deuxième partie du livre, entièrement consacrée à l'Ethiopie, est d'ailleurs la plus intéressante (selon moi) car quelques rites y sont rapportés. Avec bien entendu, l'ombre du doute planant toujours : est-ce vraiment un rite tel qu'il est habituellement réalisé ou une performance pour les occidentaux ? Notre narrateur doute. Toujours. 


Quelques mots sur Michel tel qu'il nous apparaît : égocentrique, c'est plutôt logique pour un journal, donc on ne le retiendra pas contre lui. Plaintif, colérique et aux tendances dépressives : sûrement. Aux rêves étranges. A la sexualité complexe (quoi que plutôt rêvée aussi pendant ces deux ans). Bref, un garçon compliqué.


Il y est également question des hommes que la mission rencontre, des objets dérobés pour enrichir les musées, des transports difficiles, des galères politiques etc. 
Dans le fond, une lecture intéressante, notamment pour l'atmosphère des années 30, la vision de l'Afrique et le portrait vivant de cette expédition et de ses membres. Pour la personnalité de M. Leiris, mieux vaut lire l'Age d'homme