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mercredi 20 mars 2013

Rue des voleurs

Un grand merci à Audiolib pour ce très beau livre de Mathias Enard. Je suis sous le charme. Le charme du conteur/lecteur, Othmane Moumen. Le charme de la plume de Mathias Enard, à la fois poétique et réaliste, légère et incisive. La charme de Lakhdar, le héros naïf qui cherche sa voie.

Tout commence à Tanger où Bassam et Lakhdar partagent leurs rêves : l'Europe pour Bassam, sa cousine Meryem pour Lakhdar. Or, quand Lakhdar peut approcher sa cousine, il le fait de trop près... et est mis à la rue par ses parents. Après des mois d'errance, son ami Bassam lui propose un job. Lakhdar devient libraire d'une association religieuse.

C'est à ce moment là que la grande histoire lance ses ombres sur le roman. La révolution arabe gronde autour de la Méditerranée, la crise espagnole réveille les indignés. L'actualité récente, brûlante, celle des attentats, des manifestations et des immolations s'invite dans le roman, discrètement
Lakhdar poursuit son éducation. Il change de boulot, rencontre Judit, une espagnole qui apprend l'arabe, et s'éloigne du Maroc.


Ce roman d'apprentissage est une magnifique réussite. En laissant l'actualité en toile de fond et en ne faisant pas de Lakhdar un personnage impliqué mais un observateur naïf qui gagne en sagesse, l'auteur interroge ce monde en crise. Il invite à poser un regard sur celui-ci, à pénétrer sa noirceur, sa violence mais aussi l'espoir des populations (ou le désespoir). Brillant. 
Alors, certes, c'est peut-être artificiel (quel roman d'apprentissage ne l'est pas?) comme j'ai pu le lire ici ou là, mais c'est très bien mené.
Petits plus : un très beau regard sur les livres. Une plume et un souffle lyriques. 

mercredi 19 janvier 2011

Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

C'est l'un des livres que j'avais noté à la rentrée. Son titre me plaisait. Sa consécration par le Goncourt des lycéens a confirmé mon envie de le lire. Beaucoup d'attentes pour ce livre et je ne suis pas trop déçue. Je vous l'assure, c'est bon signe.

J'imagine que tout le monde sait vaguement de quoi il retourne. Bon je vous fais le pitch en bref : Michel Ange supporte mal que Jules II le néglige. Bajazet lui propose de faire un pont à Istanbul. Le sculpteur accepte. Il sort peu. Il prend la température de la ville de temps à autre mais préfère rester dans sa chambre, à dessiner. Il a deux interlocuteurs privilégiés, un poète qui l'aime secrètement, Mesihi, et son interprète, Manuel. Et viennent s'intercaler au récit de l'élaboration du pont (ou plutôt de la recherche d'une idée de pont car de pont lui même, il n'y en a pas) les pages amoureuses d'un être que je ne dévoilerai pas.

Courts chapitres, phrases sans longueurs mais petite langueur dans l'écriture, livre éclair. Vous ne perdrez pas beaucoup de temps à la lecture. Le style est aussi plaisant, ciselé, presque poétique parfois.

Hélas, les projections gâchent un peu tout. Après tout, c'est au lecteur d'imaginer les influences de ces rencontres, d'oser des parallèles avec les œuvres peintes ou sculptées. Quel dommage que cette liberté soit ôtée ! Et que le livre verse parfois dans une psychologie un peu légère sur l'homosexualité du maître. 


Sinon, belle description d'Istanbul et de ses plaisirs, de ses livres et de ses conteurs... Une petite envie d'exotisme à la lecture du roman de Mathias Enard.